La joute verbale entre les Etats-Unis et l'Iran sur le nucléaire à New York finira-t-elle par faire oublier l'ordre du jour de la conférence d'examen du traité de non-prolifération ? Entre Téhéran qui tente de placer Washington en position d'accusé, et la capitale fédérale qui, en avocate du « fermé » club atomique, attribue aux Iraniens une force de nuisance qu'ils pourront avoir au plus tôt, dans « trois à cinq ans », la « révision » du TNP que les puissances occidentales ne respectent pas et la dénucléarisation du Proche-Orient se fraient difficilement un espace. Téhéran affirme mordicus qu'elle n'a aucune intention de se procurer la « répugnante et honteuse » arme nucléaire. Elle a certes raison d'accuser Washington qui se focalise sur un hypothétique programme nucléaire iranien et refuse à quiconque de souffler mot sur l'arsenal atomique israélien de pratiquer la politique de deux poids, deux mesures. «Arguments éculés, faux et délirants », dira Hillary Clinton soupçonnant les Iraniens qu'elle menace de payer un prix fort s'ils violent les règles du jeu actuelles de chercher la «diversion ». Comme pour mobiliser le maximum de monde derrière les Etats-Unis, elle annonce le nombre exact d'armes nucléaires dont dispose son pays : 5 113, contre 31 255 au plus fort de la guerre froide. « Les Etats-Unis sont prêts, dit-elle, à progresser vers la vision d'un monde sans armes nucléaires ». « Un couteau ne tranche jamais son propre manche », lui rétorque M. Ahmadinejad, estimant qu'il serait « naïf et irrationnel de croire à une initiative volontaire efficace de désarmement » des puissances nucléaires. Débat de sourds comme en 2005, où la conférence d'examen du TNP s'était soldée par un échec ? Fort possible. Surtout si les puissances nucléaires ne désarment pas et continuent à interdire aux pays du Sud l'acquisition d'un savoir-faire nucléaire que le TNP leur reconnaît. La proposition de mise en place de « banques internationales » de combustible nucléaire où ces puissances seraient les seuls actionnaires n'est-elle pas assez explicite ? UN MOYEN-ORIENT DÉNUCLÉARISÉ Les pays arabes du Moyen-Orient qui sont sollicités pour mettre l'Iran à l'index, refusent depuis d'occulter l'arsenal nucléaire effectif d'Israël. Ils veulent la création d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen-Orient, conformément à la résolution 487 (1981) du Conseil de sécurité et la résolution de la Conférence d'examen de 1995. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon n'est pas contre. « Les zones dénucléarisées apportent une contribution substantielle au désarmement et à la non-prolifération des armes nucléaires. Elles instaurent la confiance et stimulent les progrès dans d'autres domaines. C'est pour cela que je soutiens énergiquement les efforts visant à créer une telle zone au Proche-Orient et vous invite à lancer une libre discussion sur ce sujet », dit-il aux participants à la Conférence du TNP. La Ligue arabe et le Mouvement des non-alignés envisagent d'inclure cet appel dans la déclaration de clôture de la conférence. Les Etats-Unis qui se sont opposés en 1995 à cette proposition pour ne pas gêner Israël, une puissance nucléaire qui n'est ni déclarée ni membre du TNP, auraient revu leur position.Ils seraient prêts à nommer un «envoyé spécial» sur cette question. «Nous sommes prêts à soutenir des mesures concrètes qui nous permettront d'avancer vers cet objectif», déclare Hillary Clinton. Pure «manœuvre de diversion» ? Possible. La Russie, qui ne désespère pas de reprendre pied dans la région, propose la convocation d'une conférence internationale pour examiner cette « proposition » qu'elle soutient.