Signalons encore que dans la tradition musulmane, le rêve est personnifié sous l'apparence d'un être extraordinaire, un ange appelé S'addiqun. Ce nom, qui provient d'un verbe, sadaqa «être véridique», s'explique par le fait que l'on croit que le personnage en question a accès aux secrets inscrits sur la Table Gardée, qu'il révèle, au moyen du rêve, sous forme de paraboles. Tous les rêves qu'il inspire sont véridiques, les rêves mensongers étant le fait des démons, S'addiqun est tantôt représenté sous la forme d'un homme à la tête gigantesque, tantôt sous celle d'un être grâcieux, comme dans ce récit de Baylaqî : «Une femme vit en rêve que l'un de ses fils tuait l'autre. Elle se réveilla en sursaut et courut mettre l'enfant menacé à l'abri. Elle se rendormit et vit cette fois-ci le Prophète qui lui demande ce qui l'avait tant effrayée. Elle lui raconte son rêve et le Prophète appela l'ange du Rêve. Celui-ci se présente sous sa plus belle forme. «Pourquoi as-tu effrayé cette pauvre femme ? – Par Dieu, répondit l'ange, ce n'est pas moi qui ai inspiré son rêve !» Puis le Prophète appela al-Ah'lâm (les rêves incohérents inspirés par le diable). Une femme très laide apparut. Le Prophète lui pose la même question : «Je l'ai vue heureuse avec ses enfants, lui répondit-elle, alors j'ai voulu la plonger dans la crainte.»