InfoSoir : Les nouveaux décrets relatifs aux procédures de la mise en conformité des constructions seront-ils à même de mettre un terme au phénomène du non achèvement des constructions ? A. Boudaoud : La loi en elle-même vient renforcer un arsenal juridique déjà existant et étoffé. La question qui se pose est de savoir si celle-ci sera rigoureusement appliquée ou restera lettre morte à l'instar des précédentes lois déjà initiées. Tout comme il est à se demander si toute l'accumulation de la réglementation ne va pas étouffer et l'administration et l'usager. Le nœud du problème réside dans la non-responsabilisation de l'architecte qui est le pilote de tous les segments. Dans ce contexte, il est, à nos yeux, impératif d'associer pleinement l'architecte dont la responsabilité sera pleinement assurée pour garantir l'application stricte et scrupuleuse des normes de construction et d'urbanisme. Des brigades seront désignées pour enquêter sur la création de groupes d'habitations. Est-ce, là, la meilleure solution ? Le pays dispose actuellement de 12 000 architectes, 3 535 ingénieurs en génie civil (en 1976 il y avait 302 architectes nationaux et étrangers) agréés par le ministère de l'Habitat, ce qui correspond à 8 architectes et 3 ingénieurs par commune. Le paradoxe est que les collectivités se plaignent du manque de moyens humains. C'est une contradiction, il faut solutionner en recourant aux compétences techniques qui sortent régulièrement des écoles. Qu'est-ce qui pousse certains propriétaires à construire d'une manière non conforme au permis de construire ? La grande responsabilité incombe à l'Etat qui n'a jamais actionné sa main lourde en intervenant énergiquement au démarrage des travaux. La preuve : des villes entières ont été bâties anarchiquement au vu et au su de tout le monde. Par ailleurs, le citoyen algérien n'est malheureusement pas pourvu d'une culture d'urbanisme et d'une pédagogie dans la construction sans doute parce qu'il est issu d'un milieu rural, dont il a tendance à ramener les ramifications par le biais d'un urbanisme incohérent. Comment évaluez-vous l'évolution des constructions privées en Algérie et quels sont les dérapages les plus fréquemment remarqués ? Le dérapage le plus grave et le plus fréquent se situe dans le fait que le privé n'a jamais recours à un technicien pour lui assurer la mission du suivi et du contrôle des travaux, laquelle est primordiale dans le secteur de la réalisation. Par ailleurs, le privé, pour des raisons économiques, à tendance a recourir à une main-d'œuvre non qualifiée et inexpérimentée...