Difficulté n Au lendemain de l'indépendance, peu d'Algériens pouvaient atteindre la terminale et passer le baccalauréat. Le nombre de bacheliers se comptait, par conséquent, sur les doigts d'une main. La politique de démocratisation de l'enseignement a permis, plus tard, aux familles, d'encourager d'abord l'enseignement des garçons avant d'admettre celui des filles. A cette époque, réussir au baccalauréat c'était plus que l'acquisition d'un diplôme qui ouvre des horizons à l'élève, mais la fierté de toute la tribu. Les lauréats étaient célébrés par leurs familles respectives et leurs proches et des limonades étaient offertes à tout le monde. Depuis, notre pays a connu des changements induits par diverses turbulences et évolutions, des situations de développement et de troubles. Ainsi, au fil du temps, le baccalauréat a perdu des points et n'a pu garder son statut. On n'écoute plus à la radio l'annonce de la bonne nouvelle sur le rythme de la chanson de Rabah Deriassa «…Djabou el-baccalauréat djabouha dhouk choudjaân…». La crise économique, vécue à partir de 1986, a précipité le début des réformes et les événements d'octobre 1988 ont mis à nu la réalité sociale de l'Algérie. Un chômage qui dépasse toute imagination et les perspectives d'emploi n'étaient pas inscrites sur l'agenda du gouvernement. La valeur du baccalauréat a commencé alors à être diversement appréciée. Par ailleurs, si par le passé les épreuves intéressaient plus les garçons que les filles, aujourd'hui l'intérêt a changé de camp. Pour les garçons, le seul intérêt de réussir au bac est d'avoir un diplôme universitaire qui leur facilitera la tâche pour quitter le pays et s'installer de l'autre côté de la Méditerranée. Autrement dit, c'est une «harga» planifiée. Idem pour les rares parmi eux qui sont studieux. Ils partagent la même ambition, à savoir travailler pour bénéficier d'une bourse à l'étranger et finir par s'y installer. Les filles, quant à elles, trouvent que la réussite au baccalauréat est une manière de décrocher quelques libertés et un savoir qui leur permettra d'affronter l'avenir avec plus d'assurance. Interrogées à ce propos, des jeunes filles croisées devant la faculté centrale d'Alger sont unanimes sur le fait que «le bac permet une certaine émancipation dans cette société qui ne pardonne pas». Ce n'est, donc, pas un hasard si, aujourd'hui, le nombre de filles universitaires dépasse de loin celui des garçons. Pour elles, seules les études sont à même de leur garantir la vie dont elles rêvent.