Le goudron servait, autrefois, à rendre imperméables les outres. On y recourt encore aujourd'hui pour calfeutrer les fuites des récipients en plastique. Il entrait également dans la fabrication de produits médicinaux : dilué dans l'eau, il passait pour calmer les gastrites et les douleurs intestinales, en usage externe, on l'employait surtout comme antiseptique des blessures et des plaies. Toujours sur la plan thérapeutique, et c'était sans doute son usage le plus répandu au Maghreb, il soignait la teigne et, chez les animaux, les dermatoses et les plaies provoquées par le bât. En magie, le goudron passait pour être un excellent protecteur contre le mauvais œil et les djinns. Dans beaucoup de régions, le 27e jour du Ramadan, jour où dit-on, les démons, enchaînés au début du mois de jeûne, sont relâchés, on se prémunit de leurs attaques en mettant un peu de goudron sur la plante des pieds. Dans les Aurès, on a gardé cette habitude – signalée au début du XXe siècle (voir M. Gaudry, 1929, p. 236) – de mettre un peu de goudron sur le front, les oreilles et les narines des enfants pour les protéger contre les épidémies. Le goudron a ainsi la même valeur prophylactique que le henné, à la seule différence que le henné a une odeur agréable et est associé, contrairement au goudron, aux fêtes.