Evocation n La caravane culturelle en hommage à Kateb Yacine a fait, jeudi, sa dernière escale, à Alger, après les différentes haltes ayant eu lieu à Annaba, Souk Ahras, Constantine et Sétif. Cinq escales, donc cinq rendez-vous pour rendre hommage à un intellectuel polyvalent, un homme à la fois écrivain, poète, journaliste et dramaturge. C'était donc à la salle Cosmos (Riad el-Feth) que l'hommage, à l'occasion du vingtième anniversaire de la disparition de Kateb Yacine, a été rendu avec, au programme, des expositions, des projections de films documentaires, des lectures de textes et des concerts. L'exposition, réalisée par Zoubeïda Chergui et Amazigh Kateb (le fils de Kateb Yacine) et intitulée «Kateb Yacine, un théâtre et 3 langues», témoignait, en images comme en documents écrits, de la vie, du parcours littéraire et artistique de cet intellectuel ayant marqué – et marque toujours – la littérature algérienne tout comme le théâtre. Outre l'exposition, trois films documentaires ont été projetés. Le premier, réalisé par Stephane Gatti, a pour titre Kateb Yacine, poète en trois langues. Ce film consiste en un entretien du réalisateur avec Kateb Yacine entrecoupé d'images de son enterrement à Alger. La Troisième vie de Kateb Yacine est un autre documentaire projeté et réalisé par Hadj Meliani. Le réalisateur rapporte différents témoignages essentiellement collectés à Sidi Bel Abbes. Enfin, le troisième et dernier film, réalisé en 1989, peu avant la disparition de l'écrivain, est celui de Kamel Dehane. Il a pour titre Kateb Yacine, l'amour et la Révolution. Dans ce film, Kateb parle de sa vie à bâtons rompus, sans retenue. A l'exposition et aux projections s'ajoute une conférence animée par l'universitaire et critique d'art dramatique Ahmed Cheniki. Dans sa communication «Le théâtre de Kateb Yacine», l'intervenant a abordé le travail théâtral de Kateb Yacine. «L'écriture théâtrale de Kateb Yacine est marquée par des influences et des emprunts», a-t-il dit, et d'ajouter : «Parmi les emprunts constatés, celui relatif à la culture populaire comme on peut noter l'influence de Brecht, une présence récurrente dans l'œuvre théâtrale de Kateb Yacine.» Ahmed Cheniki a, en outre, souligné : «On ne peut pas comprendre ses textes satiriques sans connaître ses textes journalistiques», et de préciser : «C'est une écriture très ouverte.» Pour sa part, Catherine Brun, de l'université Paris III, a évoqué Nedjma, œuvre magistrale de Kateb Yacine. «C'est un roman fondateur de la littérature, écrit par Kateb Yacine pour montrer aux Français que l'Algérie n'était pas française», a-t-elle dit à propos de Nedjma, et de poursuivre : «C'est un livre autobiographique générationnel, car touchant ceux qui ont vécu les mêmes événements que lui. Nedjma évoque aussi la prise de conscience collective et la quête des origines avec un emboîtement de plusieurs récits.» A noter que selon la conférencière, Nedjma figure au programme des collèges et lycées en France depuis 1985. «Depuis l'année dernière, Nedjma est au programme de l'École normale supérieure», a-t-elle fait savoir. l Des lectures de textes ont été assurées par Brahim Hadj Meliani qui, accompagné de deux musiciens, lisait des textes de Kateb Yacine sur un fond musical puisé du répertoire de Dahmane El-Harrachi. D'autres textes, ceux tirés du Cadavre encerclé ont été lus par le comédien Sid Ahmed Agoumi. Il a lu également un passage du livre de Benamar Mediene, Kateb Yacine, un cœur entre les dents. Plus tard, et côté musique, Djmaoui Africa a pris part à ces journées «katébiennes», avec un répertoire essentiellement puisé dans l'Afrique. Ensuite, et pour clôturer cette journée, cette dernière escale, Amazigh, le fils de Kateb Yacine, a interprété deux titres de son nouvel album Marché noir, dont les textes sont de son père, et d'anciens tubes. A rappeler que cette manifestation culturelle placée sous le générique «Cinq escales pour Nedjma», a été initiée par l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (Aarc), en partenariat avec les agences Neef Prod et ACMEvent. Elle a combiné, durant une semaine (du 13 au 17 décembre) et au fil des différentes escales, plusieurs activités artistiques et intellectuelles. Toutes les dimensions de l'immense talent créateur de Kateb Yacine ont été abordées à travers le théâtre, la poésie, le cinéma, les conférences débats et la musique. L'objectif de cette manifestation a été tout d'abord de rendre un hommage à cet homme de lettres mais aussi de faire connaître à la jeune génération l'œuvre immensément riche de cet artiste entier qui a voué sa vie et ses créations à l'Algérie.