Résumé de la 5e partie n Ce sont les policiers qui arrivent dans l'immeuble et non la mort. Luciano Lutring est conduit à la prison de la Santé où il se sent une vocation d'écrivain... Je vous sais gré de m'avoir envoyé vos livres. Vous en avez, je crois, un autre en préparation. Luciano Lutring lui répond dans un français parfait, avec un léger accent. — Oui, monsieur le président. Il aura pour titre La Course à la mort. — Avec les droits d'adaptation à l'écran, cela vous fait des revenus substantiels. Vous avez, paraît-il, l'intention d'en consacrer une partie à une œuvre de bienfaisance. — Parfaitement, un centre de réadaptation pour jeunes délinquants. Ma femme possède onze hectares dans un joli site de la campagne lombarde. On va faire construire une maison dont les pères de Saint-François-de-Sales s'occuperont... Le ton est donné. Il est évident que la justice française ne s'acharnera pas contre le «soliste à la mitraillette» et qu'il peut compter sur l'indulgence du jury. Celui-ci, d'ailleurs, comprend quatre femmes ; avec le charme de Luciano, c'est un atout supplémentaire en sa faveur... La suite des débats va dans le même sens. L'accusé tient à se débarrasser de la réputation qu'on lui a faite. — Je n'ai jamais tiré un seul coup de feu, monsieur le président. Tout cela, c'est du bidon, du cinéma ! C'est la police italienne qui est responsable. Chaque fois qu'il y avait un hold-up, elle me le mettait sur le dos. Elle disait : «C'est encore un coup de Lutring.» — Pourtant, on a retrouvé chez vous une mitraillette dans un étui à violon. C'est d'ailleurs ce qui vous a valu votre surnom. — C'était un souvenir. La mitraillette, elle était toute rouillée. Elle ne pouvait pas servir. — Alors pourquoi l'emportiez-vous avec vous ? C'était pour vous faire passer pour un artiste ? — Si, Signor président. J'ai toujours regretté de ne pas savoir jouer du violon... Le public rit, les jurés sourient, le président s'en abstient parce qu'il ne peut pas se le permettre, mais il est évident que l'atmosphère n'est pas à la sévérité. Et la déposition du docteur Roumageon, expert psychiatre, est tout aussi favorable à l'accusé. — Lorsque j'ai rencontré Lutring la première fois dans sa cellule, il y a cinq ans, j'ai été en présence d'un garçon un peu fou, une sorte de personnage de western, semblable à ceux qui tirent sur le pianiste quand la musique ne leur plaît pas. Mais il y a un mois, j'ai trouvé en prison un garçon posé, intelligent, animé d'intentions généreuses, un romancier qui a toute une carrière devant lui. C'est bien simple, je ne l'ai pas reconnu... La principale accusation porte sur une attaque de bijouterie à Moulins, lors de l'année 1965. Un brigadier de police avait été atteint de trois balles, dont l'une dans la colonne vertébrale, qui l'avait laissé invalide à vie. Lutring a toujours nié avoir été sur les lieux, mais il avait sur lui, au moment de son arrestation, l'arme qui avait tiré les coups de feu. Il a déclaré qu'elle lui avait été vendue par un mauvais garçon, Armando Guccicardo, qui lui avait affirmé qu'elle n'avait jamais servi. (à suivre...)