Quelques jours avant l'ouverture du procès de l'ennemi public numéro un du pays, le 1er mars, les Belges revoient le film des événements et se répètent que l'enlèvement, la séquestration et le viol d'au moins six fillettes, dont quatre sont mortes, auraient pu être évités si l'Etat avait fonctionné. La ministre belge de la Justice, Laurette Onkelinx, a rappelé, la semaine dernière, combien la révélation des agissements de Marc Dutroux avaient «ébranlé en profondeur la nation», donnant de la Belgique une image terrible à l'étranger. Pour Claude Javeau, sociologue de l'Université libre de Bruxelles, «l'affaire Dutroux a révélé que l'Etat ne faisait pas ce qu'il devait faire» en matière de justice et de police. Les autorités belges ont, en effet, eu, à plusieurs reprises, l'occasion d'arrêter ce prédateur sexuel multirécidiviste déjà condamné en 1989 à 13 années de prison pour des viols sur mineures lorsque toutes les fillettes étaient encore en vie. Dès le mois de juin 1995, la gendarmerie recueille ainsi les révélations de Claude Thirault, une connaissance de Marc Dutroux, qui affirme que ce dernier lui a fait part de son intention d'enlever des enfants et de les séquestrer. Or, les petites Julie et Melissa, dont les cadavres seront retrouvés le 17 août 1996, ne seront enlevées que le 24 juin 1995 et seront séquestrées environ neuf mois par le pédophile. En août 1995, la gendarmerie belge lance l'opération Othello pour vérifier ces informations. L'absence de communication entre la police et la justice ainsi qu'une rivalité entre police et gendarmerie entraînent son échec. La suite est, tragiquement, de la même eau. Le 13 décembre 1995, la gendarmerie effectue une perquisition dans la cave de sa maison de Marcinelle et y recherche une cache aménagée pour y séquestrer des enfants. Elle n'y trouve pas l'endroit ingénieusement camouflé, mais qui n'aurait pas dû résister à des sondages plus serrés. Le manège de Marc Dutroux dans le jardin de sa maison de Sars-la-Buissière, où il utilise une pelleteuse, et les va-et-vient d'enfants sont remarqués par les voisins et même dénoncés aux autorités par... la propre mère de Dutroux. La machine policière ne connaîtra qu'un seul succès trop tardif pour sauver Julie, Melissa, An et Eefje, même s'il permettra de retirer Sabine et Laetitia vivantes de la cache, le 15 août 1996, à la suite d'une enquête rondement menée. Après la disparition de Laetitia, le 9 août 1996, à Bertix, un policier sonne à toutes les portes de cette petite ville wallonne et tombe sur un adolescent qui a été intrigué par la présence sur place d'une camionnette dont l'immatriculation commence par FRR. L'ordinateur mène ? enfin ? à Dutroux. (à suivre...)