La grille de la prison d'Arlon s'est refermée sur Marc Dutroux, qui a été condamné à la réclusion à perpétuité pour l'enlèvement, la séquestration, le viol et l'assassinat de plusieurs fillettes. Les jurés de la Cour d'assises de cette petite ville belge, où la vie a été rythmée pendant près de quatre mois par le procès, ont mis un point final à une affaire qui a bouleversé le pays depuis la découverte de cinq cadavres pendant l'été 1996. En trois heures, ils ont tiré pour les peines les conséquences de leur premier verdict sur la culpabilité rendu la semaine dernière, même si les coaccusés du psychopathe ont bénéficié d'une relative clémence qui a choqué certains parents. «Marc Dutroux, vous avez été condamné au maximum de la peine», a annoncé le président de la Cour, Stéphane Goux. «Je crois que vous vous en sortez quand même mieux que la plupart de vos victimes, qui ne font plus partie du monde des vivants.» Le jury l'avait jugé coupable de l'enlèvement, de la séquestration et du viol de Julie, Melissa, An, Eefje, Sabine et Lætitia. Seules ces deux dernières ont survécu et ont assisté presque de bout en bout au procès de leur bourreau. Dutroux a donc été condamné à perpétuité pour l'assassinat d'An, d'Eefje et d'un complice, Bernard Weinstein, peine assortie d'une clause qui permettra au gouvernement de le maintenir en prison pendant dix ans dans le cas ? très hypothétique ? d'une libération conditionnelle. Julie et Melissa, dont les corps ont été retrouvés dans le jardin de Dutroux, seraient mortes de faim dans la cache de sa cave entre décembre 1995 et mars 1996, pendant que Dutroux était en prison dans le cadre d'une autre affaire. Sans montrer la moindre émotion derrière l'épaisse vitre blindée de son box, l'homme le plus haï de Belgique avait voulu plaider une dernière fois sa cause lorsque Stéphane Goux lui a donné la parole avant l'entrée du jury en délibération. S'il a reconnu quatre des six enlèvements ainsi que les viols de Sabine et Lætitia, libérées le 15 août 1996 de leur cache, il affirme avoir trouvé, un jour, Julie et Melissa chez lui. Il les aurait protégées d'un «réseau» en les cachant. Quant à An et à Eefje, avait-il dit à l'audience, elles ont été emmenées un jour de septembre 1995 par des membres de ce réseau de pédophilie dont il dit n'avoir été qu'un rouage. Le pédophile a laissé entendre qu'il ne s'en tiendrait pas là, contrairement à ses avocats, qui ont annoncé leur intention de ne pas introduire un pourvoi en cassation. «Comment passer sous silence la campagne médiatique qui a ignoré ma présomption d'innocence ?», a-t-il expliqué en faisant allusion aux deux commissions d'enquête parlementaires et à la large diffusion dans la presse des 400 000 pages du dossier. Son ex-épouse, Michèle Martin, qui n'a pas bénéficié de circonstances atténuantes, a été condamnée à 30 ans de prison, et son complice, Michel Lelièvre, à 25 ans. (à suivre...)