Jamais la Coupe du monde n'a connu un scandale aussi délirant, éclaboussant et très mauvais pour l'image d'un pays comme celui que vit la France à travers la crise profonde qui secoue les Bleus, notamment avec cette affaire de vestiaire qui a éclaté au grand jour. Et rien n'arrête la descente aux enfers. Après la main d'Henry, le scandale Ribery, c'est au tour de Nicolas Anelka de faire imploser le vestiaire avec cette affaire d'insultes à Raymond Domenech, «le plus mauvais sélectionneur que la France ait connu depuis Louis XVI» (dixit Eric Cantona), le coach qui s'est mis à dos toute l'opinion et la presse française, sauf peut-être les dirigeants de la FFF, à leur tête le président Jean-Pierre Escalettes. Ce dernier a tenté de sauver les meubles en faisant dans le politiquement correct tout en excluant Anelka, sans pour autant se soucier que dans son dos se tramait «la révolte du Bounty» puisque les joueurs sont montés au créneau hier, refusant carrément de s'entraîner. Du jamais vu ! «Prise d'otage», «mutinerie», «mercenaires», «rébellion», «bande de guignols», «la honte», «la risée», et l'on passe, tous les qualificatifs qui renseignent sur le déchaînement de la presse française sur ce scandale qui a fait déjà une première victime : Jean-Louis Valentin, le directeur de la sélection. La situation est d'une telle gravité que l'Elysée a exigé une réunion d'urgence avec la ministre des Sports. Evra et ses coéquipiers, eux, se solidarisent avec leur coéquipier Anelka, s'attaquent à la Fédération et partent à la chasse à la taupe, celui qui a trahi le vestiaire, là où se trouve le cœur de l'équipe. Là où s'écrivent grandes et petites histoires, où naissent les grands exploits et les plus dramatiques désillusions. Là où se partagent de banals et terribles secrets, où se jouent de fausses tragédies et de vrais psychodrames. Là où se règlent des comptes à coups de gueule ou se fêtent des succès jusqu'à l'extase. C'est dans un vestiaire que se construisent les grandes victoires, mais c'est aussi l'endroit où se font et se défont les affinités, la cohésion d'une équipe, la solidarité d'un groupe. Un vestiaire, c'est un lieu frappé de confidentialité, d'intimité, protégé et gardé que les médias et les voyeurs de tout bord ont toujours voulu en percer le secret. Aujourd'hui, pour des raisons multiples, cette intimité est trahie et portée sur la place publique, alors que le linge sale ne peut se laver qu'en famille. Le pouvoir de l'argent et de la médiatisation à outrance a pris le dessus sur le calme apaisant d'un vestiaire dont le thermomètre de l'ambiance est dicté par les résultats et rien d'autre. Cet événement qui a ébranlé le vestiaire français pourrait, de nos jours, arriver à n'importe quelle équipe. D'ailleurs, les représentants de la presse algérienne font état, ces derniers jours, de coups de gueule et de prises de bec entre Rabah Saâdane et quelques joueurs mécontents de leur statut de remplaçants. Dans les coulisses, on raconte qu'il a fallu l'intervention de hautes autorités du pays pour tempérer les ardeurs d'un Ghezzal qui, menacé d'exclusion, s'est confondu en excuses vis-à-vis de son coach, ce qui n'est pas le cas pour son coéquipier Mansouri qui boude toujours. Et comme la taupe est dans le vestiaire, toute l'opinion est au courant. Rien n'arrête la taupe.