Résurrection n Double championne du monde de football en 1930 et 1950, la Celeste a traversé le plus long des déserts avant ce retour en grâce, peu attendu, à l'occasion de ce Mondial sud-africain. L'Uruguay est redevenue une grande sélection de football. Hier soir, face à l'Allemagne, l'une des équipes les plus impressionnantes et talentueuses du plateau, la Celeste s'est montrée sous son plus beau jour. Certes, elle a été maladroite et parfois naïve, mais elle s'est surtout montrée combative, volontaire et déterminée se permettant même de rattraper puis de devancer la Mannschaft avant d'être reprise par le talent d'une Allemagne prometteuse. Elle aurait même pu pousser les coéquipiers de Thomas Müller jusqu'au bout de la nuit sans une bonne poignée de malchance et une frappe capricieuse de Diego Forlan venue s'éclater contre la transversale de Butt. Au-delà de ce match pour l'honneur assombri par le courage des Allemands, l'horizon apparaît pleinement dégagé pour le maillot ciel de ce pays d'à peine trois millions et demi d'habitants. L'Uruguay c'est tout simplement la plus grande concentration de footballeurs du monde. Sur ce minuscule territoire noyé par les immenses espaces de ses voisins sud-américains, nul n'est étranger au ballon rond. La rivalité qui l'oppose au cousin argentin fait rage à chaque confrontation et ne s'apaise que lorsque s'affrontent le Peñarol et le Nacional dont les rencontres se terminent rarement sans blessés. Au pays du premier vainqueur de la Coupe du Monde, le foot est une passion, presque une religion. Pourtant, depuis 60 ans, son peuple est sevré de succès. Deux triomphes hâtifs en Coupe du Monde et puis… plus rien. La Celeste a même raté les éditions 1958, 1978, 1982, 1994, 1998 et 2006 ! De quoi nourrir les frustrations et faire monter la tension, à l'ombre d'une Argentine rayonnante. Cette fois pourtant la Celeste a dominé l'Albiceleste. Mais peut-elle s'installer durablement au plus haut de la scène mondiale ? C'est l'espoir des nostalgiques d'une époque… L'Uruguay n'a pas un grand championnat, ni même les moyens financiers pour (re)bâtir un empire footballistique sur des bases saines et sereines. Pourtant, la profondeur de son vivier n'est plus à démontrer et les compatriotes de Luis Suarez peuvent avoir confiance en un avenir proche. Comment ne pas considérer cette équipe comme l'une des favorites de la prochaine Copa America et même lui donner rendez-vous dans quatre ans, au Brésil, à deux pas de chez elle, pour de nouveaux exploits ? Diego Forlan n'en fera sans doute plus partie, à 30 ans il a vécu ses plus grands moments de footballeur, mais comment ne pas voir les jeunes talents qui l'entourent ? Luis Suarez n'a que 23 ans, au même titre qu'Edinson Cavani et Nestor Muslera. Fucile, Godin, Caceres ou Lodeiro n'en ont pas 25. Et d'autres arriveront, tous animés par une nouvelle référence, une nouvelle performance de leur équipe nationale venue dépoussiérer l'antique souvenir d'un glorieux passé. N'en déplaise à Oscar Tabarez, l'Uruguay est de retour et le monde du football est prêt à l'accueillir. 500 000 personnes attendent la Celeste l Demain lundi, les coéquipiers de Diego Forlan pourraient être reçus et fêtés par près d'un demi-million de personnes pour leur retour à Montevideo. Plus d'un Uruguayen sur sept pourraient être présent pour accueillir la Celeste à son retour d'Afrique du Sud, demain, lundi, à Montevideo. 500 000 des 3 500 000 habitants sont attendus dans la capitale uruguayenne, demain, pour ce qui devrait être l'une des plus grandes fêtes de l'histoire du pays. «Si l'euphorie des gens persiste, l'assistance tournera autour d'un demi-million de personnes», précise un responsable de la sécurité au journal La Republica. Tabarez : «On n'est pas si loin des meilleurs» l Le sélectionneur de l'Uruguay Oscar Tabarez a mis hier samedi la défaite de son équipe contre l'Allemagne (3-2) dans le match pour la 3e place du Mondial-2010 sur le compte d'un «nombre trop important d'erreurs», en défense notamment : «Ce match a été disputé par deux équipes qui avaient vraiment envie de terminer à cette 3e place, par deux équipes qui ont tout donné. On a fait une erreur de trop, mais on a montré ce dont on était capable. On a montré qu'on pouvait rivaliser avec n'importe quelle équipe dans le monde. Oui, on a perdu ce soir, mais on aurait pu gagner, car je ne crois pas que l'Allemagne était meilleure que nous. Il faut féliciter mes joueurs pour ce qu'ils ont fait aujourd'hui et durant le tournoi. On a fait trop d'erreurs en défense et on a aussi gâché un certain nombre d'occasions, alors que dans un match comme celui-ci, les occasions sont rares. Quand on a encaissé ce deuxième but, on dominait et l'Allemagne n'était pas au mieux, c'est pour moi le tournant de ce match. On a fait un très bon boulot défensivement et offensivement. Et fait preuve de beaucoup de détermination et d'ambition. Bien sûr, on a été surpris de constater qu'on n'est pas si loin des meilleurs. Le chemin à suivre est clair pour nous : il faut continuer sur cette voie. L'Uruguay a été l'une des surprises de ce tournoi, on ne se rend pas encore compte de ce qui s'est passé chez nous. J'ai reçu vendredi un courrier électronique d'une dame que je ne connaissais pas et qui me disait : «Merci, merci d'avoir changé l'image de notre pays.» Je suis surpris, c'est toute la beauté du sport et du travail sérieux que l'on a accompli». Il aimerait rester à la tête de la sélection … l Le sélectionneur uruguayen Oscar Tabarez a indiqué, hier, samedi, après la défaite de son équipe dans le match pour la 3e place contre l'Allemagne (3-2) qu'il aimerait diriger encore la Celeste. «Je suis plus proche de la fin de ma carrière que du début, mais je me sens O. K. physiquement. Cela m'intéresserait de poursuivre avec l'Uruguay, mais ce n'est pas le moment de parler de cela», a-t-il déclaré. «Je ne veux pas donner l'impression que je suis demandeur de quelque chose. A partir de ce soir, mon contrat est terminé et je ne suis plus sélectionneur de la Celeste. Tout ce qui va se passer va dépendre des propositions qui vont arriver», a poursuivi «El Professor». Agé de 63 ans, Tabarez est en poste depuis mars 2006. … Et surpris par les sifflets visant Suarez l Le sélectionneur de l'Uruguay, Oscar Tabarez, a admis hier avoir été surpris par les spectateurs qui ont systématiquement sifflé l'attaquant Luis Suarez lors du match pour la 3e place du Mondial contre l'Allemagne (2-3). «C'est difficile d'expliquer la réaction des gens. Ils veulent le punir, mais ce qu'il a fait peut arriver à n'importe quel joueur», a-t-il déclaré. «Je comprends que le Ghana était le dernier espoir de l'Afrique, mais les Ghanéens ont raté un penalty et se sont inclinés aux tirs au but», a souligné le sélectionneur de la Celeste. Tabarez s'en est pris à «la presse britannique qui a attisé le feu de cette polémique». «Mais pour nous, ce qui s'est passé ne change pas l'image que nous avons de l'Afrique du Sud, de sa grande hospitalité», a-t-il insisté. A chaque fois qu'il touchait le ballon, Suarez était copieusement sifflé par une partie des 36 000 spectateurs du Mandela Bay Stadium qui n'avaient pas digéré son geste en fin de prolongation du quart de finale contre le Ghana. Il avait repoussé avec les mains un tir ghanéen dans la dernière minute de la prolongation, geste qui lui avait valu son exclusion puis sa suspension pour la demi-finale contre les Pays-Bas. L'arbitre avait ordonné un penalty pour le Ghana, manqué par Asamoah Gyan. L'Uruguay avait finalement éliminé le Ghana (1-1, 4 t.a.b à 2). Forlan : «On n'aurait jamais pensé goûter à un tel moment» l «Finir dans les quatre premiers, c'est spectaculaire. Au début, on n'aurait jamais pensé goûter à un tel moment. On voulait cette 3e place mais on reste sur le positif. On a essayé d'arriver en finale et on n'y est pas arrivé, mais on a savouré ce Mondial, où on a joué sept matches. Ce soir, il nous a manqué peu de chose, on était beaucoup mieux en 2e mi-temps, mais on a fait quelques erreurs et on a perdu. En qualifications on était bien, même si on n'avait pas forcément les résultats, mais bon, l'équipe s'était qualifiée pour le Mondial, où on a montré qu'on avait fait du bon travail. C'est terminé et maintenant on va se reposer. Voir tant de maillots et drapeaux uruguayens, c'est spectaculaire». Fucile : «Je suis heureux de ce que j'ai fait» l «Je suis fier de ce qu'on a fait, on a été au niveau, parmi les quatre meilleurs. On méritait un peu mieux vu les circonstances du match. C'est la différence avec les grandes équipes comme l'Allemagne, qui ont la chance qu'on n'a pas, elles ont la tête froide et toujours ce petit quelque chose qui permet de gagner. Pour l'Uruguay, c'est le début d'un nouveau cycle, l'Uruguay est là où il doit être. Personnellement, je suis heureux de ce que j'ai fait, j'ai montré au monde qui est Fucile». Perez : «Fier du travail effectué» l «C'est une sensation bizarre : l'Uruguay a fait un bon match, on a marqué deux buts, comme contre les Pays-Bas, et on perd quand même. L'Uruguay a montré dans ces deux matches qu'il avait progressé, qu'il avait davantage le ballon, mais il a manqué quelques détails. Il me reste une saveur amère de pas pouvoir offrir cette dernière victoire au pays. Il faut retenir le positif de cette expérience, même si on a fait des erreurs qu'on ne peut pas se permettre contre des équipes aussi fortes. Forlan ? Excellent, c'est le reflet de tout l'Uruguay, il a réussi ce que l'Uruguay attendait de lui. On part l'esprit tranquille, fier du travail effectué depuis quatre ans, sans oublier qu'il nous reste des lacunes».