Résumé de la 1re partie Barbe bleue, parti en voyage, a laissé à son épouse, qui a reçu ses amies à la maison, les clefs de toutes les pièces, lui interdisant toutefois formellement d?en ouvrir deux. La jeune femme et ses amies montèrent ensuite aux garde-meubles, où elles pouvaient admirer le nombre et la beauté des tapisseries, des lits, des sofas, des guéridons, des tables et des miroirs, où l'on se voyait depuis les pieds jusqu'à la tête, et dont les bordures, les unes de glace, les autres d'argent et de vermeil doré, étaient les plus belles qu'on eût jamais vues. Elles ne cessaient d'envier le bonheur de leur amie qui, cependant, ne se divertissait point à voir toutes ces richesses, à cause de l'impatience qu'elle avait d'aller ouvrir la pièce de l'appartement bas. Elle fut si pressée de curiosité que, sans considérer qu'il était malhonnête de quitter sa compagnie, elle y descendit par un petit escalier dérobé, et avec tant de précipitation qu'elle faillit se rompre le cou deux ou trois fois. Etant arrivée à la porte de la pièce, elle s'y arrêta quelque temps, songeant à l?interdiction que son mari lui avait faite, et considérant qu'il pourrait lui arriver malheur d'avoir été désobéissante ; mais la tentation était si forte qu'elle ne put la surmonter : elle prit donc la petite clef, et ouvrit en tremblant la porte. D'abord, elle ne vit rien parce que les fenêtres étaient fermées ; après quelques moments, elle commença à voir que le plancher était tout couvert de sang coagulé, et que dans ce sang se miraient les corps de plusieurs femmes mortes et attachées le long des murs (c'étaient toutes les femmes que Barbe bleue avait épousées et qu'il avait égorgées l'une après l'autre). Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet qu'elle venait de retirer de la serrure lui tomba des mains. Après avoir repris ses esprits, elle ramassa la clef, referma la porte, et monta à sa chambre, mais elle ne pouvait venir à bout, tant elle était émue. Ayant remarqué que la clef du cabinet était tachée, elle l'essuya deux ou trois fois, mais le sang ne s'en allait point. Elle eut beau la laver, et même la frotter avec du sablon et avec du grès, il y demeura toujours du sang, car la clef était magique, et il n'y avait pas moyen de la nettoyer tout à fait : quand on ôtait le sang d'un côté, il revenait de l'autre. Barbe bleue revint de son voyage le soir même, et dit qu'il avait reçu des lettres en chemin, qui lui avaient appris que l'affaire pour laquelle il était parti venait d'être terminée à son avantage. Son épouse fit tout ce qu'elle put pour lui témoigner qu'elle était ravie de son prompt retour. Le lendemain, il lui redemanda les clefs, et elle les lui donna, mais d'une main si tremblante, qu'il devina sans peine tout ce qui s'était passé. (à suivre...)