Résumé de la 15e partie n Victoria n'imaginait pas échouer, ni même cette malchance qui enverra son amoureux à quelque trois milliers de milles de Londres... Il est probable qu'elle passera la nuit à la clinique. Elle a conservé sa chambre au Savoy. Retour à New York par avion le 23, place retenue pour cette date. L'homme qui s'était annoncé comme étant Sanders du Fleuve marqua une pause... Puis, sur un ton qui n'avait plus rien d'officiel, il ajouta : — Et si vous voulez mon avis, nous perdons notre temps sur une fausse piste ! Elle fiche l'argent par les fenêtres, un point, c'est tout ! Douze livres dix-huit shillings de fleurs, je vous demande un peu... Victoria – et c'est tout à son honneur – n'envisagea pas une seconde la possibilité d'un échec. Elle arriverait à ses fins, elle n'en doutait pas. Bien sûr, apprendre que le jeune homme dont on vient tout juste de tomber amoureuse va s'en aller à quelque trois milliers de milles de Londres, alors qu'il aurait très bien pu rester en Angleterre ou ne pas dépasser Bruxelles, c'était jouer de malchance ! Pourtant, ça ne changera rien... Que ce fût difficile ou non, elle irait à Bagdad d'une façon ou d'une autre ! Mais comment ? Elle y songeait tout en suivant sans se presser le trottoir de Tottenham Court Road. Bagdad ? Qu'est-ce qu'elle irait bien faire à Bagdad ? Edward avait parlé de «relations culturelles». La culture c'était l'affaire de l'Unesco qui ne cessait d'envoyer aux quatre coins du monde des gens qui ne se plaignaient généralement pas de leur situation. Seulement, à l'Unesco les places étaient réservées à des jeunes filles titulaires de titres universitaires et qui étaient déjà «dans le bain». Il fallait trouver autre chose... Jugeant qu'il fallait procéder par ordre, Victoria alla d'abord prendre des renseignements dans une agence de voyages. On pouvait se rendre à Bagdad sans difficulté aucune. On avait le choix : on pouvait y aller en avion ou bien par mer avec arrivée à Bassorah, ou prendre le train jusqu'à Marseille, le paquebot jusqu'à Beyrouth et finir le trajet en car. On pouvait aussi passer par l'Egypte. Le plus pratique c'était l'avion, lequel simplifiait la question des visas, parfois difficiles à obtenir. Bagdad étant dans la zone «sterling», le problème monétaire ne se posait pas. Façon de parler évidemment car qu'on choisît une route ou une autre le voyage coûtait entre soixante et cent livres cash. Ce qui compliquait sérieusement les choses pour Victoria dont l'avoir ne dépassait pas trois livres dix (moins neuf pence), douze shillings qui lui restaient depuis qu'elle avait reçu son compte et cinq livres déposées à la Caisse d'épargne. Elle demanda à tout hasard si l'on avait besoin d'hôtesses de l'air. Elle n'insista pas quand elle sut que les postulantes se comptaient par centaines et devaient attendre des mois avant de pouvoir seulement exposer leurs titres. Victoria se rendit donc à son agence de placement ordinaire, où Miss Spenser la gratifia du sourire ambigu qu'elle réservait aux clientes qu'elle revoyait souvent. — Encore vous, mademoiselle Jones ! J'espérais pourtant que cette fois la place... (à suivre...)