Problème n Le personnel pédagogique et administratif a saisi toutes les autorités concernées pour trouver une solution suite à la fermeture de cet établissement. La décision précipitée de fermer cette structure a été prise pour céder la parcelle de terrain au projet de la grande mosquée d'Alger. Une décision dont le personnel, plus de 100 employés, ne prendra connaissance qu'au mois de ramadan. Ils devront être affectés soit à l'école des sourds-muets de Télemly, soit à l'établissement de Baraki. Ces deux écoles, héritant d'un fardeau très lourd, affichent d'ailleurs une réticence à peine voilée à l'arrivée des nouveaux pensionnaires. Cette mutation, le moins que l'on puisse dire, n'est pas du goût de l'effectif enseignant, encore moins des parents d'élèves, qui n'hésitent pas à manifester leur mécontentement. Et pour cause, les conséquences d'un tel changement seraient dramatiques sur le plan psychologique pour les enfants, avertissent unanimement les psychologues et le personnel pédagogique. "Ce sont des cas spécifiques dont certains ont été suivis depuis l'âge de trois ans. On connaît tous leurs problèmes, qu'ils soient d'ordre affectif ou social. Une relation de confiance s'est ainsi établie entre chaque enseignant et ses élèves. Amputer ces classes pour les intégrer dans d'autres structures détruirait un travail de plusieurs années", explique le collectif des enseignants, qui dénonce le mépris et le dénigrement dont sont victimes cette catégorie déjà peu gâtée par la vie. La Direction de l'action sociale est mise à l'index en premier, selon les témoignages recueillis sur place. Elle, dont la fonction est avant tout de veiller à une bonne prise en charge de ces enfants handicapés, "refuse de débattre ce problème au sein de cette école et menace de passer à l'affectation dans les plus brefs délais". "Nous n'avons à aucun moment été associées à cette décision", relatent outrés les éducateurs.Alors que les premières sanctions commencent à tomber, surtout les retrait sur salaire, les éducateurs loin d'être intimidés campent sur leur position. Ils appellent le ministère de la Solidarité à "situer les responsabilités de ce recasement anarchique". Et à trouver un site qui puisse accueillir l'ensemble de l'effectif et les 137 élèves scolarisés dans cette école. Construite en 1886, cette impressionnante bâtisse, qui appartenait au cardinal Lavigerie avant d'être cédée, au prix du dinar symbolique en 1975, au profit des enfants sourds muets, est une des structures pilotes en matière de résultats scolaires. On évoque un taux de 100% de réussite au cycle primaire et certains universitaires qui ont passé leur cursus scolaire au sein même de cet établissement. De l'avis des parents d'élèves, la décision serait tombée tel un couperet. Désorientés, ils ne savent plus à quel saint se vouer, entre les promesses de la tutelle et l'avenir incertain de leurs enfants. "Mon fils a neuf ans. Il est dans cette école depuis l'âge de cinq ans. Il refuse de quitter son enseignante et ses camarades de classe. Dans sa tête, la décision est prise. Il n'ira pas dans une autre école. Il dit vouloir aller travailler si la décision de fermer cette école venait à être appliquée", raconte cette mère de famille venue s'informer sur les rebondissements de cette affaire. L'intérêt des enfants qui est au cœur de toutes les décisions politique, économique ou sociale sous d'autres cieux semble passer au second plan dans notre pays. Au vu et au su des plus hautes instances, le droit des handicapés à la scolarité est peu considéré. L'exemple des enfants sourds muets de l'école d'El-Mohamamdia en est d'ailleurs plus qu'édifiant. Les autorités disposaient pourtant d'un délai de quatre ans pour trouver une solution appropriée à ce problème. Pourquoi alors avoir attendu tout ce temps pour venir à la veille d'une rentrée scolaire perturber des enfants qui ne demandent qu'à savourer ce rendez-vous au même titre que ceux des écoles ordinaires ?