Résumé de la 21e partie n ll y avait à bord un personnage qui ressemblait à des milliers d'autres et rien n'indiquait qu'il soit un Anglais détenteur d'un secret qui risquait de lui coûter la vie… Ses chefs lui ayant laissé sa liberté d'action, il avait choisi lui-même sa route, et pour plus de sécurité il ne fit pas connaître l'itinéraire qu'il suivrait. L'avion, qui ne fut pas au rendez-vous convenu, lui donnait la preuve de l'existence de fuites toujours inexplicables et traîtresses. Il sentait que les périls allaient en s'accroissant. L'idée qu'il pourrait échouer si près du but lui était insupportable. Tirant en cadence sur ses rames, le vieil Arabe dit sans tourner la tête : — Le moment approche, mon fils. Qu'Allah soit avec toi ! - Tu ne t'attarderas pas, mon père, et tu retourneras tout de suite aux Marches. Je ne voudrais pas qu'il t'arrivât malheur. — Tout est écrit, mon fils. Je suis entre les mains d'Allah ! — Inch' Allah ! L'embarcation s'engageait dans un chenal, à angle droit avec le fleuve. La navigation y était intense. Manœuvrant habilement, l'Arabe accosta. — Nous y voici ! murmura-t-il. Que Dieu aplanisse ton chemin et allonge les jours de ton existence ! Carmichaël gravit l'escalier glissant qui montait au quai. Là, il retrouva des images familières : accroupis sur le sol, des gamins offraient aux chalands des marchandises diverses : oranges, gâteaux, sucreries, lacets de soulier, peignes bon marché, ect. Des gens, vêtus à l'orientale, allaient et venaient sans hâte. Un peu plus loin, de l'autre côté de la rue, là où se trouvaient les boutiques et les banques, de jeunes effendis habillés à l'européenne circulaient dans une foule où se remarquaient bon nombre d'Européens, en majorité des Anglais. Et qu'il y eût depuis un instant un Arabe de plus à Bassorah, nul ne paraissait s'en soucier. Carmichaël se mit en route. Il allait lentement, comme indifférent au spectacle qu'il avait sous les yeux, attentif seulement à se racler la gorge de temps à autre et à cracher par terre pour rester dans son personnage. A deux reprises, il se moucha dans ses doigts. II franchit le pont qui enjambe le canal et entra dans les souks. Là, tout était bruits et mouvements. Des indigènes se bousculaient pour se frayer un chemin, certains chassant devant eux un bourricot lourdement chargé, des gosses se chamaillaient, ne cessant de se disputer que pour courir derrière les Européens en implorant un backchich... Là, on vendait de tout, la production européenne voisinant avec les marchandises indigènes. Il y avait des poêles en aluminium, des théières, des cuivres martelés, de l'argenterie d'Amara, des montres en acier, des pots émaillés, des broderies venues de Perse et des tapis de même origine, des coffres en bois, des vêtements d'occasion, des couvertures, des lampes peintes, des jarres en argile, tous les produits du pays et tout ce que l'industrie européenne a spécialement conçu pour une certaine exportation. (à suivre...)