Sidi Bouzid fait tout pour retenir Sidi Ali, à chaque fois, il trouve le même prétexte : «Tu ne pourras pas partir avant de nous avoir tout dit sur telle question.» Et comme à chaque fois, il y a une nouvelle question qui surgit, c'est là un bon moyen de retenir son hôte davantage. Sidi Ali reste donc et les jours ne cessent de passer. Chaque matin, Sidi Bouzid s'attend à ce que Sidi Ali parle de départ et, à chaque fois, il prépare des questions qui vont l'occuper toute la journée... Les semaines passent et le saint homme, occupé à prêcher et à enseigner, oublie l'objectif de son voyage. Se rendre au Hédjaz, accomplir le pèlerinage, que Dieu a prescrit aux musulmans qui avaient les moyens de l'accomplir... Et puis, le pèlerinage lui revient en mémoire et il se met à compter sur ses doigts : il n'aura pas le temps, s'il voyage à pied, comme il l'a décidé, d'arriver à temps, en Terre Sainte, pour la station de Arafat... Et le pèlerinage sans la station, le wuquf, la veille de l'aïd al-adha, ce n'est pas le pèlerinage. Il va retrouver Sidi Bouzid et lui dit : «Maître, cette fois, c'est décidé, je ne peux plus rester. Je vais reprendre immédiatement la route, j'ai peur de ne pas arriver à temps à La Mecque pour faire le pèlerinage, mais je vais quand même tenter ma chance !»