En passant devant l'étal d'un boulanger qui a exposé des miches de pain toutes dorées et toutes chaudes, Sidi Messaoud, qui avait faim, en prend une et s'en va sans payer. Le boulanger le poursuit et le traîne sur la place publique, promettant de le faire bastonner. Les gens se rassemblent. Quelques-uns reconnaissent le saint homme. «Misérable, disent-ils au boulanger, tu maltraites sidi Messaoud !» Le boulanger se confond aussitôt en excuses, craignant une vengeance du saint. — Je veux bien te pardonner, dit Messaoud, mais à condition que tu m'invites ainsi que tous ces gens-là à un couscous ! «J'invite tout le monde, s'écrie le boulanger, heureux d'être pardonné». Le soir, tout le monde se rend chez lui ; on se régale de couscous et de viande. A la fin, Messaoud montre du doigt le boulanger et dit. «Mes amis, voilà un homme vil et misérable ! Il m'a poursuivi et a menacé de me bastonner, parce qu'il m'a pris pour un pauvre. Mais dès qu'il a su qui j'étais, il s'est confondu en excuses et a accepté d'organiser un repas coûteux. Voilà quelqu'un d'impitoyable qui refuse un pain à un pauvre affamé mais qui fait une grosse dépense pour flatter un homme dont il veut tirer profit ! Et le saint s'en va, sans pardonner au boulanger. Les gens comprennent la leçon et chassent le boulanger de leur ville.