Carence n Les Algériens, lorsqu'ils achètent leur pain, réclament rarement la monnaie. Pour eux, l'essentiel c'est d'en trouver, qu'importe la qualité ! Le pain se fait en effet rare dès l'entame de l'après-midi et durant les jours fériés et les fêtes religieuses. On voit d'ailleurs souvent de longues files d'attente tôt le matin devant les boulangeries. Les clients sont alors tellement contents de trouver du pain qu'ils pensent rarement à réclamer leur monnaie. Ce qui constitue une aubaine pour les boulangers. Nombreux sont les consommateurs qui ignorent que le prix du pain ordinaire est fixé légalement à 7,50 DA et celui du pain amélioré à 8,50 DA. Dans certaines wilayas, des boulangers ont trouvé la parade en proposant deux baguettes à 15 DA pour éviter de rendre la monnaie. Et le manque de liquidités au niveau des commerces et même des banques et bureaux de poste n'est pas pour arranger les choses. A l'approche des fêtes, la fièvre monte d'un cran. Le lait et le pain deviennent alors le souci majeur des ménages. C'est à l'aube qu'il faut sortir pour en trouver. Des vendeurs profitent de ces situations de crise pour imposer à leur clientèle des produits en parallèle. C'est le cas de ce vendeur de lait à Médéa qui obligeait ses clients à acheter, outre leur sachet de lait, un sachet de petit-lait ! Les consommateurs paniqués à l'idée d'être privés durant quelques jours d'un produit alimentaire de base, vont jusqu'à le stocker, privant ainsi d'autres foyers d'en acquérir. Comme cette mère de famille à Alger qui a acheté 8 sachets de lait et qui, une demi-heure plus tard, est revenue faire la queue devant le même camion de livraison pour en avoir 8 autres ! Ce sont là des faits qui rappellent l'époque des grandes pénuries qu'avait connues notre pays dans les années 80 où tout manquait : beurre, huile de table, café et bien d'autres denrées alimentaires. Interrogé sur la question du prix du pain, le gérant d'une boulangerie à Alger nous confie : «Je vends la baguette à 8,50 DA... Je comptabilise le sachet d'emballage à 1 DA, le total fait 9,50 DA. Et comme les pièces de 50 centimes sont introuvables, la monnaie n'est pas rendue…». Tout le monde adhère à la même formule. Certains boulangers choisissent d'augmenter le poids du pain à 260 g pour justifier la hausse du prix du pain. Hakim, gérant d'une boulangerie à Alger-Centre, déclare : «J'ajoute 10 g puisque le poids officiel d'une baguette de pain ne dépasse pas les 250 g pour justifier la différence que je gagne (50 centimes).» Quant à la pénurie de la farine, la plupart des commerçants d'Alger disent ne pas en avoir trop souffert, disposant d'un ancien stock qui a servi à la préparation des pâtisseries et du pain durant les jours qui ont suivi les fêtes de l'Aïd.