Nous finirons cette longue série par l'évocation de quelques figures de sages, dont les actions et les propos sont passés à la postérité sous forme d'adages ou autres. On commencera par le personnage de Bouamrane. On a parfois rapproché ce personnage d'Esope. Comme lui, on ignore l'époque exacte où il a vécu, comme lui, sa vie se mêle de légendes, comme lui, son nom est utilisé pour illustrer divers faits qui lui sont postérieurs…Jusqu'au portrait physique des deux hommes qui se ressemblent : on dit que Esope est de teint brun, maigre et accablé de difformités, on dit que Bouamrane était maigre et noiraud. Les récits de l'un comme de l'autre sont issus de la tradition populaire et si on les leur a attribués, c'est parce que leurs noms sont devenus célèbres. On se demande même si certaines anecdotes, comme celles des langues, à la fois bonnes et mauvaises, n'appartiennent pas à un fond méditerranéen commun. Signalons qu'on a également comparé Bouamrane à Loqman, le sage oriental évoqué dans le Coran. Un auteur, comme le Français Henri Genevois, a même rassemblé les anecdotes attribuées au sage sous le titre significatif de «Bouamrane, Loqman Kabyle». Selon lui, comme les récits de Djoha, les récits de Bouamrane nous viennent d'Orient : ils ont été simplement adaptés au contexte et aux habitudes locales.