Opinion n Toumani Kouyaté est comédien et metteur en scène burkinabé. Il est aussi conteur. Rencontré dernièrement au Théâtre national, il dira, à propos du conte : «Ma participation consiste à animer des séances consacrées à l'art de la parole, c'est-à-dire raconter et mettre en situation le conte», et de reprendre : «Notre but est de restituer au conte la place qui lui revient.» Toumani Kouyaté estime qu'il est nécessaire de prendre une véritable place dans l'enceinte du théâtre.«C'est un peu regrettable que le conte soit mis en arrière», dit-il. Ainsi, le conte, qui est une partie intégrante à l'art de la parole, se révèle le parent pauvre du théâtre. «Le conte est effectivement le parent pauvre du théâtre, il est toujours sclérosé, marginalisé, il n'est pas rendu visible notamment dans les festivals et ce, partout dans le monde», regrette-t-il, et de poursuivre : «Or, il n'y a aucun art d'oralité sans parole. Si on dit oralité, il y a parole. Le conte est la base de toute parole de communication artistique.» «On a négligé le conte parce qu'on a l'image du conte traditionnel dans les villages, les gens pensent que le conte est destiné uniquement aux enfants, que c'est le grand-père et la grand-mère qui racontent autour du feu, le conte a dépassé ce stade-la, il est devenu un art spectaculaire. Jusque-là, on n'a pas encore montré l'art spectaculaire du conte en Algérie.» En outre, le conte revêt, pour Toumani Kouyaté, une importance capitale dans l'apprentissage de l'individu, puisqu'il porte en lui une dimension pédagogique et intellectuelle. Le conte est spectaculaire. Car, selon Toumani Kouyaté, «lorsqu'on dit un conte, ce ne sont pas des histoires où les gens vont s'asseoir et s'endormir. Le conte nourrit l'esprit et éveille la conscience ; et, en sortant, les gens diront : ‘'On a appris quelque chose.'' Le conte se révèle alors la plus grande école de connaissance de l'humanité. Il se trouve aussi que le conte se présente comme étant un art à part entière : le conteur est comédien, metteur en scène, il est chanteur, musicien, le conteur est un bon orateur, il est complet et il fait son décor lui-même. Pour un comédien, devenir conteur, c'est difficile. Il y a un vrai travail à faire : l'art du conte, c'est l'être humain. Qui dit conte, dit création, donc spectacle.» Ainsi, pour redonner au conte sa véritable place, Toumani Kouyaté estime qu'il faut d'abord savoir que le conte est un art complet et complexe. «Il faut donner au conte la place qui lui revient, pour lui permettre de s'exprimer et ce, en déployant des moyens, du genre ramener ce dernier (le conte) à la salle», dit-il, et de poursuivre : «Le conte est capable de s'installer dans une salle. Le conte a besoin de ces lieux. Et aussi il faut donner aux conteurs la capacité dont il a besoin pour créer, c'est-à-dire lui favoriser un environnement propice à l'innovation.» «Il faut savoir également que pour diriger un conte, il faut des connaisseurs, des personnes sachant l'interpréter, le dire, l'organiser. Pour le mettre en scène, il faut des techniciens, l'appareil logistique qui va avec, lui permettant de situer le conte sur scène», conclut-il.