Convivialité n Nora Aceval, conteuse et écrivain, était, mardi, l?invitée de la rencontre organisée à la librairie Chihab. Nora Aceval aime dire les contes ancestraux et les écrire pour les faire partager avec les lecteurs. Car, considère-t-elle, c'est un devoir de perpétuer une mémoire ainsi qu?un imaginaire séculaire, commun à tous les Algériens. À la question de savoir comment elle en est venue là, Nora Aceval répond : «Je n?ai jamais quitté le conte, j?ai l?impression qu?il m?a toujours habitée.» Effectivement, les contes, cet univers magique et authentique qu?elle prend du plaisir à dire aussi bien en arabe qu?en français et de la manière la plus traditionnelle, donc la plus ancestrale, existaient en elle ; et ils ne se sont manifestés, plus tard, que par ce besoin de s?exprimer. C?est parce qu?ils renvoient à un référent culturel, le sien (sachant qu?elle vit en France et qu?elle est donc à la jonction de deux identités) que Nora Aceval a éprouvé ce besoin si pressant de collecter les contes en les enregistrant, puis en les transcrivant pour les dire ? en toute authenticité ? dans ses nombreux livres, comme «Contes et Traditions d?Algérie» ou encore «Contes du Djebel Amour». «Je ne voulais pas les perdre», dit-elle, précisant que sa démarche consiste à «sauvegarder le patrimoine oral [qui est, disons-le, en perdition], garder cette mémoire pour les générations à venir.» Ainsi, Nora Aceval perpétue la trace des conteurs traditionnels par la transmission des contes qui ont bercé son enfance, et ceux qu?elle collecte ? et continue de recueillir. «Rester dans la tradition, c?est quelque chose de fort et d?une grande richesse», dit-elle. Et d?ajouter : «Je raconte les contes qui m?habitent depuis plusieurs années. Un conte peut mettre dix ans avant d?être dit.» Par ailleurs, Nora Aceval souligne que la collecte des contes est une entreprise difficile. Elle dit : «La collecte des contes se passe difficilement, cela ne se fait pas comme ça, ce n?est pas une chose que l?on commande immédiatement au conteur ? ou à la conteuse. Il faut provoquer le conte, exhorter la parole, susciter celui-ci ou celle-ci et dans une situation donnée, favorable, conter.» Dire un conte, selon elle, c?est comme accomplir un rite. Le conteur a besoin de concentration et de spontanéité. «Le conte ne se dit pas comme ça, il vient tout seul», explique-t-elle. Nora Aceval déplore que, de nos jours, et avec l?invasion de la télévision, les grand-mères, malgré elles, ont perdu l?habitude de dire des contes. Elle lance un appel à prendre des initiatives pour entamer la collecte des contes et les transcrire en vue de les laisser pour la postérité, car le conte constitue un fonds commun à tous les Algériens, un capital, ô combien précieux, puisqu?il est une référence de notre identité. Cette action s?inscrit ainsi dans l?immédiat, c?est-à-dire l?urgence de prendre en charge notre mémoire, donc notre identité.