Mobilisation n De nombreux pays dans le monde évacuaient hier, mercredi, par air et par mer, dans des conditions difficiles, les dizaines de milliers de leurs ressortissants travaillant en Libye, pris au piège des violences. Cinq mille Tunisiens, 171 Libyens, 22 Algériens et 28 Marocains, fuyant le chaos libyen, sont ainsi arrivés hier, entre minuit et 16 heures locales, en Tunisie via le principal poste frontalier de Ras Jedir. D'autre part, «830 Chinois attendent de l'autre côté de la frontière pour des raisons administratives». En Asie, les autorités se préparaient à mettre en place de gigantesques opérations d'évacuation pour rapatrier 100 000 travailleurs. 60 000 Bangladais, 30 000 Philippins, 23 000 Thaïlandais et 18 000 Indiens sont enregistrés en Libye. Le Bangladesh étudiait ainsi différentes options pour évacuer ses ressortissants. Les Philippines ont indiqué, de leur côté, avoir l'intention d'acheter des billets d'avion pour leurs ressortissants. L'Inde finalisait, quant à elle, les dispositions pour une évacuation par air et par mer. Pour sa part, la Chine a annoncé aujourd'hui avoir déjà évacué 4 600 de ses plus de 30 000 ressortissants grâce à une importante opération navale, terrestre et aérienne. Par ailleurs, l'Union européenne (UE) a annoncé qu'il restait 10 000 de ses ressortissants en Libye et qu'elle mobilisait des moyens pour être en mesure de les évacuer, y compris par voie maritime au cours des prochaines heures et prochains jours.Un avion militaire français avec à son bord 165 touristes, dont 152 Français, en provenance de la ville de Sebha, à 660 km au sud de Tripoli, dans le sud-est de la Libye, est arrivé hier soir à Paris. Au total, la France aura en deux jours évacué 556 personnes, dont 487 Français. Pour rappel, trois avions allemands avaient atterri avant-hier, mardi, à Tripoli où se trouvent environ 400 Allemands. Alors que 800 Italiens ont été rapatriés depuis le début des troubles, Ankara a, de son côté, annoncé avoir rapatrié plus de 5 000 Turcs (sur les 25 000 présents en Libye), mais déplore un mort. La Russie a rapatrié, hier, 339 de ses ressortissants de Tripoli arrivés à Moscou à bord de trois avions et a dépêché un ferry pour évacuer des personnes se trouvant dans deux autres villes. Enfin, un ferry affrété par les Etats-Unis, arrivé hier à Tripoli, devait en repartir pour Malte. Les rues de Tripoli quasi désertes ce matin Au dixième jour de l'insurrection contre le régime du colonel Kadhafi, les rues de la capitale Tripoli étaient quasi désertes ce matin après une nuit troublée par des tirs nourris, notamment dans la banlieue Est. Dans la région orientale riche en pétrole tombée aux mains des opposants, les murs criblés de balles dans la ville d'Al-Baïda sont autant de stigmates de la violence des combats entre opposants et «mercenaires» à la solde du dirigeant libyen. Une dizaine de généraux et de colonels faisaient défection et juraient fidélité au peuple libyen et à la révolution, acclamés par la foule. «J'ai démissionné et je suis venu à Al-Baïda pour être solidaire de mon peuple. Je serai en première ligne pour nous défendre contre toute attaque venant de l'extérieur», assure le général Salah Mathek, un responsable de la police judiciaire. «Ils nous ont ordonné d'attaquer le peuple et j'ai refusé. On ne peut pas utiliser les armes contre nos jeunes», explique un autre général, Abdel Aziz al-Busta. «On parle de marcher sur Tripoli. Notre objectif est Tripoli, si Tripoli n'arrive pas à se libérer par lui-même», dit un autre officier. Les opposants semblent contrôler la région orientale, de la frontière égyptienne jusqu'à la localité d'Ajdabiya plus à l'ouest, en passant par Tobrouk, Derna et Benghazi, épicentre de la contestation à 1 000 km à l'est de Tripoli. Un millier d'Algériens rapatriés Près d'un millier de ressortissants algériens ont été rapatriés de Libye, suite à la dégradation de la situation sécuritaire dans ce pays, a-t-on appris aujourd'hui, jeudi, de la cellule de suivi installée à cet effet. «Ils ont été rapatriés à bord de 4 vols d'Air Algérie», a indiqué la même source, précisant que l'opération se poursuit. Près de 8 000 Algériens sont établis en Libye. Le secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé de la Communauté nationale à l'étranger, Halim Benatallah, a indiqué, mardi dernier, que les vols spéciaux se poursuivront pour rapatrier «en urgence» tous les ressortissants algériens désireux de rentrer au pays. M. Benatallah a déploré la mort d'un Algérien, ajoutant que des Algériens ont été victimes aussi d'attaques de bandes armées, selon des témoignages recueillis auprès des ressortissants rapatriés. La fille de Kadhafi dément avoir quitté le pays Aïcha, fille du dirigeant libyen, Mouammar Kadhafi, a démenti hier soir à la télévision d'Etat, les informations diffusées par des télévisions arabes, selon lesquelles elle aurait quitté le pays. «Je dis aux Libyens et Libyennes que j'aime et qui m'aiment, que je résiste devant cette maison résistante», a-t-elle dit dans une brève déclaration à la télévision, dans l'enceinte de la résidence, Bab Al-Azizia, du colonel Kadhafi, à Tripoli. Des médias ont rapporté que Aïcha Kadhafi était à bord d'un avion libyen de la Libyan Arab Airlines qui n'a pas été autorisé à atterrir, hier, à l'aéroport de La Valette. Les Nations unies ont mis fin à la fonction d'ambassadrice de bonne volonté de la fille de Mouammar Kadhafi, en raison des événements tragiques en Libye. «Les Libyens qui me connaissent bien savent que je reste ambassadrice de bonne volonté de tous les Libyens», a réagi Aïcha qui avait été nommée ambassadrice de bonne volonté du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) pour parler de la violence contre les femmes et du sida en Libye. Les activités de Sonatrach «pas affectées Le ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, s'est montré aujourd'hui, jeudi, rassurant concernant les activités du groupe Sonatrach en Libye, secouée depuis plusieurs jours par des violences. «Sonatrach continue ses opérations en Libye et ses activités n'y seront pas affectées» par ces troubles, a assuré M. Yousfi à la presse tard dans la nuit, à la veille d'une visite dans le Sud. Le ministre a, dans ce sens, rappelé que Sonatrach en est à sa deuxième découverte en Libye. Le groupe Sonatrach avait annoncé, en mai dernier, avoir réalisé, en partenariat avec la compagnie libyenne NOC, une seconde découverte de pétrole dans le bassin de Ghadames, près de la frontière algéro-libyenne. La première découverte a été réalisée dans le bloc 65, attribué à Sonatrach par la NOC en mars 2005. Selon certaines sources, le bassin de Ghadames où opère le groupe algérien se trouve loin des zones de troubles, et, de ce fait, un rapatriement des employés algériens, au nombre de 80, présents sur place n'est pas à l'ordre du jour pour le moment. Les prix du pétrole flambent Le baril de brent de la mer du Nord pour livraison en avril a frôlé les 120 dollars ce jeudi vers 07h 55 GMT à 119,79 dollars, avant de se replier, soutenu par les troubles qui agitent le monde arabe et notamment la Libye, important producteur d'or noir. Le brent a atteint ainsi son plus haut niveau depuis 30 mois. Le prix du baril de cette qualité de pétrole, qui fait référence en Europe, est retombé à 117,01 dollars peu avant 09h 00 GMT. De son côté, le baril de «light sweet crude» pour livraison en avril, a fait un saut de plus de 4 dollars en quelques minutes et s'affichait à 102,05 dollars.