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Ce matin/ Gardes communaux
Ils ont marché à Alger !
Publié dans Info Soir le 07 - 03 - 2011

Eux, qui étaient là quand la république a eu besoin d'eux, ils ne veulent pas aujourd'hui accepter d'être des laissés-pour-compte. Ils veulent un statut digne, une vie décente et surtout une reconnaissance morale à la hauteur de leurs sacrifices. Les gardes communaux, ces oubliés, tout comme les patriotes d'ailleurs, font entendre leurs voix. Ce matin, rassemblés à Alger, ils ont forcé plusieurs cordons de police pour marcher de la place des Martyrs à l'APN.
Les éléments de la garde communale, venus des différentes wilayas du pays, ont observé ce matin un sit-in à la place des Martyrs pour exprimer leur rejet de la récente proposition du ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales et exiger «une juste récompense à la mesure de leurs sacrifices» dans la lutte contre le terrorisme. Vers 9h 30, des centaines de gardes communaux étaient déjà sur place, certains en uniforme et d'autres en civil. Ceux en uniforme ont «ceinturé» la placette, alors que ceux en civil se trouvaient à l'intérieur. «Nous voulons assurer le bon déroulement de notre manifestation. De cette manière, nous ne laissons aucune chance aux intrus qui pourraient perturber ce mouvement», nous explique un garde communal, venu de la wilaya de Relizane. Des véhicules des forces anti-émeutes étaient stationnés aux alentours de la placette, observant avec précaution le déroulement du sit-in. Les éléments de la brigade anti-émeute se sont, en effet, contentés de se positionner hors du cercle formé par les protestataires. Sur une grande banderole accrochée aux piliers de la «tribune», on pouvait lire : «Hier des gardiens de la République, aujourd'hui un fardeau sur le dos de l'Etat.» Les gardes communaux s'estiment méprisés après de longues années de lutte anti-terroriste et de sacrifices pour le rétablissement de la sécurité. «Combien de nos éléments sont aujourd'hui handicapés et vivent dans la misère ? Pourquoi l'Etat ne veut pas être reconnaissant à notre égard, nous qui avons passé de longues années dans les maquis ? Pourquoi veut-on nous imposer des solutions qui ne nous arrangent guère, alors que nous demandons juste une vie décente ? Est-ce la juste récompense pour des citoyens qui ont choisi de se sacrifier pour la stabilité du pays ?», s'interroge, avec amertume, un groupe de gardes communaux. La déclaration du ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, mercredi dernier, relative au redéploiement des gardes communaux comme agents de sécurité dans les administrations, a suscité le courroux de ces derniers. «Une attitude pareille est indigne. Nous n'accepterons jamais de travailler dans des administrations sous les ordres d'un directeur qui pourrait être un terroriste repenti. Nous ne pouvons accepter les directives de nos ennemis d'hier», tonne un autre groupe de protestataires. Les gardes communaux, dont le nombre global dépasse 95 000 éléments, revendiquent d'être employés dans l'ANP ou le corps de la police, une retraite décente pour ceux ayant dépassé 50 ans et qui ont passé plus de dix ans dans le maquis, une compensation des heures de travail supplémentaires, une réévaluation de l'assurance ( 24h/24), le paiement de leurs congés annuels cumulés, des aides pour l'acquisition de logements et aussi une prime de «lutte contre le terrorisme» de 500 000 dinars.
Difficultés à rejoindre Alger
Les éléments de la garde communale ont éprouvé d'énormes difficultés pour rejoindre la capitale. Selon certains d'entre eux, les barrages de la police dressés à l'entrée d'Alger ont tout fait pour essayer de les dissuader. «Nous sommes venus en mini-bus. Nous étions une vingtaine en uniforme. Dans le même bus, se trouvaient une femme et son époux. Au barrage de la police des Bananiers, à Bab-Ezzouar, un policier a tout simplement demandé au couple de descendre avant d'ordonner au chauffeur de faire demi-tour. Le chauffeur était alors contraint de rebrousser chemin. Il a trouvé un autre passage qui nous a permis de rejoindre nos camarades», témoigne un groupe de gardes communaux venus de la wilaya d'El-Tarf. D'autres gardes communaux venus de la wilaya de Relizane et de Mascara ont même été menacés. «Un policier, au niveau de Bir-Mourad-Raïs n'a pas hésité à prendre son arme et à nous menacer. Je suis parvenu à lui enlever l'arme tout en lui disant que sa formation est loin d'égaler notre longue expérience dans les maquis. Il m'a alors prié de lui restituer son arme, et c'est ce que j'ai fait en lui expliquant que nous ne sommes pas ses ennemis, mais juste des citoyens venus réclamer leurs droits», nous a raconté un membre de ce groupe.
11 gardes communaux tués dans un accident
Voulant rejoindre le mouvement de protestation, des gardes communaux de la wilaya de Constantine ont trouvé la mort, ce matin, dans un accident de la circulation à l'entrée d'Alger. L'information, parvenue au lieu de la manifestation vers 9h30, a attristé les protestataires. «Allah Yerham Echouhada», ont-ils scandé à plusieurs reprises. «Aujourd'hui, nous avons perdu des frères, mais nous devons poursuivre notre mouvement jusqu'à satisfaction de nos revendications légitimes», ont-ils insisté.
Déterminés à aller jusqu'au bout
Les milliers de gardes communaux qui ont occupé ce matin la place des Martyrs sont déterminés à y rester jusqu'à ce que l'Etat réponde favorablement à leurs doléances. «On ne quittera pas les lieux. On va dormir ici et chaque matin, on organisera un sit-in jusqu'à ce que l'Etat nous écoute et prenne des décisions dignes de nos sacrifices», ont souligné des protestataires. D'ailleurs, les gardes communaux ont des draps et des couvertures dans des cabas. «Nous n'allons quitter cette place qu'après que le président de la République décide de répondre favorablement à nos revendications», ont-ils insisté.


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