Résumé de la 3e partie n Constance est inquiète, elle ne comprend pas pourquoi Vincent lui dit toujours : «Appelle-moi quand tu seras seule»... Clara retourne dans sa chambre, Constance dans la sienne. A nouveau le temps s'écoule avec lenteur. Une demi-heure plus tard, Constance se lève une seconde fois pour l'appeler. Elle n'y tient plus. Brusquement, tandis qu'elle compose le numéro, une idée lui vient, une idée folle : lui offrir ce qu'elle lui refuse depuis sept ans : «Allô, Vincent ? — Oui. — Veux-tu que je vienne ? — Maintenant ? — Oui, maintenant. Tu le veux ?...» Evidemment, il le veut ! II ne pense qu'à elle, et qu'à ça. Il en devient fou. «Bon, j'arrive, mon amour.» Un bruit de porte : «Encore !» s'exclame Clara qui jaillit de sa chambre. Au bout du fil, Vincent a entendu : «Tu n'es pas seule ? — Non... C'est Clara.» De nouveau, la voix de Vincent devient plus sourde et plus froide. Il grogne : «C'est insupportable, ne m'appelle pas si tu n'es pas seule.» Et il raccroche une fois encore. Mais Constance court jusqu'à sa chambre et lance à Clara médusée : «Tu peux me prêter ta voiture ? Je vais chez Vincent.» En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, elle jette sur le lit son pyjama, enfile un collant car il fait froid à New York en décembre, une jupe, un corsage, un pull et, après un coup de peigne, jette son manteau sur ses épaules en appelant : «Clara ! Clara !» Où diable est passée Clara ? Elle ne répond pas. Constance fait le tour de l'appartement pour constater que son amie n'est plus là. Peut-être dans le parking ? Elle doit sortir la voiture ! Brave Clara... Constance sort, ferme la porte et appelle l'ascenseur. Si elle était dans son état normal, peut-être sentirait-elle que tout ne tourne pas rond, que certaines réactions de Vincent et l'attitude de Clara ne sont pas naturelles. Mais Constance n'est pas dans son état normal. Quand une Italienne de vingt ans décide, dans les années 60, de jeter sa virginité aux orties, au milieu de la nuit, elle ne peut pas être dans un état normal. A chaque étage, l'ascenseur fait entendre une petite sonnerie, et Constance, en l'écoutant, se mord les lèvres de contrariété. C'est bête, elle a oublié de demander à Vincent le code de la porte d'entrée de son immeuble. Il faut qu'elle le rappelle au téléphone. Constance appuie sur le bouton rouge. L'ascenseur s'arrête. Elle appuie maintenant sur le bouton du neuvième étage et, de petite sonnerie en petite sonnerie, la voilà sur le palier, refaisant le couloir en sens inverse et cherchant sa clef pour ouvrir la porte. A la sortie du parking, Clara doit s'impatienter. Constance court au téléphone, compose le numéro de Vincent. Une sonnerie, deux sonneries, trois... quatre... cinq... Ce n'est pas possible, il est forcément là ! Elle a dû mal composer le numéro. Se forçant au calme, Constance raccroche et recommence : Deux sonneries. Enfin, au bout du fil, Vincent décroche. Mais ce n'est pas lui... Elle s'est encore trompée, c'est une voix de femme qui répond : «Allô ?...Allô ?...» Evidemment, Constance hésite à faire le rapprochement. Cette voix de femme qu'elle connaît si bien, ce n'est qu'une ressemblance, ce ne peut être qu'une ressemblance ! «Allô.., reprend la voix de femme, c'est toi, Constance ?...» La voix de la femme est haletante et glaciale. «Allons, parle, je suis sûre que c'est toi... — Oui... c'est moi, murmure Constance complètement désemparée. — Tu ne me reconnais pas ? — Non... si... Enfin, c'est pas possible, on dirait... c'est toi, Clara ? — C'est bien moi. Tu veux Vincent ? Eh bien, je vais te le passer. Ce sera la dernière fois que tu l'entendras, parce que je viens de le tuer.» Glacée d'horreur, Constance entend jaillir de l'appareil des gémissements lamentables, coupés d'affreux borborygmes. Ils sortent de la bouche de Vincent. Clara, ivre de fureur jalouse, vient de poser le combiné sur les lèvres de son amant secret, de son amant mourant, avec un sang-froid théâtral. Elle ne pleure même pas devant l'amant mort.