Constat n Longtemps considéré comme un «fléau qu'il fallait déraciner», le commerce informel est, ces derniers temps, toléré par les pouvoirs publics. Les émeutes ayant secoué plusieurs régions du pays au début du mois de janvier dernier, ayant malheureusement fait des morts parmi des jeunes manifestants, et l'annonce de l'intention du gouvernement de donner un ancrage juridique à ce phénomène sont les principaux éléments ayant motivé cette expansion sans précédent du commerce informel. Un simple tour dans les quartiers populaires de la capitale permet de constater à quel point le «trabendo» a pris des ailes. Le nombre de commerçants informels a sensiblement augmenté et les trottoirs sont squattés à tel point qu'il est quasi impossible de s'y frayer un passage. Tout se vend et à des prix très abordables. La détérioration du pouvoir d'achat d'une grande frange de la société est aussi pour beaucoup dans ce retour fracassant du commerce informel. Aux Trois-Horloges de Bab El-Oued, à la rue de La Lyre et à la place des Martyrs, l'activité commerciale connaît une dynamique remarquable. Des produits de beauté aux… clous, on y trouve tout et à bon prix. Les vendeurs, contrairement à il y a quelques semaines seulement, exercent leur activité dans une sérénité totale, ne craignant aucun désagrément. «Ce n'est que ces dernières semaines que je me sens dans mon pays et je gagne mon pain tranquillement. Les policiers n'osent plus nous déranger. Je suis fier de l'aboutissement de nos revendications. Enfin, les pouvoirs publics ont compris que nous sommes capables d'arracher nos droits pour une vie décente», affirme fièrement un vendeur de vêtements d'enfants à la rue de la Lyre. «C'est grâce à notre engagement de défendre nos droits que nous jouissons aujourd'hui de cette liberté de travailler sans encombre. Nous ne sommes pas des voleurs de l'argent public ou des criminels, mais nous voulons juste gagner notre vie décemment», dit un autre vendeur à la sauvette. Et les désagréments causés aux citoyens qui doivent se bousculer pour se frayer un chemin sur les trottoirs ? Les vendeurs à la sauvette en imputent la responsabilité aux pouvoirs publics. «Si nous avions bénéficié de locaux pour exercer notre activité, croyez-vous que nous aurions préféré les trottoirs ? Pensez-vous que la vente sur les trottoirs est agréable ?», s'interroge un groupe de vendeurs à la place des Trois-Horloges (Bab El-Oued). D'autres commerçants sont allés jusqu'à dire que «le souci majeur des citoyens est d'acheter ce dont ils ont besoin à des prix abordables et non de marcher tranquillement sur les trottoirs». Un fait remarquable et qui peut leur donner raison. Presque personne ne se plaint des désagréments. Au contraire, les passants préfèrent acheter auprès de ces vendeurs à la sauvette. Décidément, chacun trouve son compte, sauf… l'économie nationale, dernier souci des pouvoirs publics dans la conjoncture actuelle.