Préservation n «Les hommes oublient plus facilement la mort de leur père que la perte de leur patrimoine», avait écrit en son temps Nicolas Machiavel, l'homme politique et philosophe italien. Cette sentence du penseur florentin semble parfaitement coller à la personnalité de Cherif Benlaâbidi qui s'acharne, malgré peu de moyens, à préserver ou à reproduire tout ce qu'il estime symboliser le riche patrimoine de la région de Souk Ahras. Si le visiteur de l'antique Taghaste trouve, de prime abord, ardu de cerner toute la richesse culturelle et historique de cette cité, un simple détour du côté de la cité du 26-Avril pourra, en effet, combler sa curiosité et lui faire faire un «voyage-express» au pays de saint Augustin. Au gré de ses déambulations au cœur de ce quartier populaire de Souk Ahras, il y a de fortes chances qu'il tombe nez à nez avec la boutique de Cherif Benlaâbidi, une «vraie caverne» d'Ali-Baba, fièrement flanquée d'une inscription à la peinture blanche : «Souk Ahras à travers l'histoire». La boutique est ornée d'une riche collection de photographies et de tableaux évoquant les différents moments historiques vécus par cette région de l'extrême est du pays, depuis la période romaine, représentée par saint Augustin, à l'apparition en 1843 de la ville actuelle de Souk Ahras, dont l'appellation Taghaste est d'origine berbère. Véritable livre ouvert, le petit réduit de M. Benlaâbidi arrive à mettre en valeur toute la richesse touristique de la région que révèlent les sites archéologiques de Madaure, de Khemissa, de Taoura et Tiffeche ainsi que les diverses stations thermales et autres paysages naturels pittoresques qui font le patrimoine matériel de cette région. L'on y apprend notamment que c'est en 1886 que le nom de Souk Ahras fut donné à la ville par le gouverneur général de l'Algérie sous l'occupation française. Ce local sert en même temps d'atelier pour cet artiste polyvalent, aujourd'hui sexagénaire, qui affirme poétiquement «adorer entendre chanter son chardonneret» lorsqu'il se met à peindre ses tableaux. Cet artiste, pétillant de vie et de passion pour sa ville, propose également à ses visiteurs divers souvenirs qu'il fabrique lui-même, dont des peintures sur tissu, des fragments de vitraux et des bijoux traditionnels. Il les invite en même temps à plonger dans l'histoire artistique de la cité de Souk Ahras à travers les photographies des grandes figures du patrimoine populaire que sont Hadj Bouregaâ, connu surtout de la communauté algérienne en France grâce à ses concerts animés à Marseille et à Grenoble, la chanteuse Beggar Hadda, l'artiste-dramaturge Mustapha Kateb, le musicien Chahid Ababsia Badi et les plasticiens Mohamed Bouthelidja, Hocine Ghomari, Salah Ledjmel et Driss Hassainia. Une petite aile de la boutique de Cherif Benlaâbidi est consacrée aux gloires sportives locales. Benlaâbidi aimerait voir se multiplier les manifestations culturelles qui mettent en valeur le patrimoine archéologique de la wilaya de Souk Ahras et la richesse des traditions populaires de ses habitants.