Le directeur du Centre français de recherche sur le renseignement estime que ces révoltes ne sont rien d'autre que «des coups d'Etat militaires prenant le visage de mouvements démocratiques spontanés». L'idée d'une «manipulation extérieure» s'appuie, selon lui, sur le fait que dans ces pays où existe «un net sentiment anti-israélien, aucun slogan anti-israélien ne soit apparu pendant les manifestations», précisant que «c'est bien l'indice d'une révolution sérieusement encadrée». Sans pour autant nier les aspirations populaires qui ont été exprimées, cet ancien agent du renseignement français, relativise cependant les changements souhaités. De retour d'une mission en Tunisie, et dans un entretien au quotidien français, La Tribune, M. Dénécé a reconnu qu'il y a dans ce pays «une réelle aspiration à plus de liberté, mais pas nécessairement à plus de démocratie», affirmant cependant ne pas croire «à la spontanéité de ces révolutions», qui, dit-il, étaient «en préparation depuis plusieurs années». Dès 2007-2008, a-t-il révélé, des conférences organisées sous l'égide d'ONG américaines, comme Freedom House, l'International Republican Institute ou Canvas, où étaient présents la plupart des blogueurs et des leaders de ces mouvements, «ont instillé le germe de la démocratie, créant un contexte favorable aux révolutions». Il soutient également que «l'imminence d'un coup d'Etat militaire était évoquée depuis dix-huit mois en Tunisie, et que, par conséquent, il n'est pas approprié de parler de «révolution», affirmant qu'il s'agit plutôt d'un «renouvellement des classes dirigeantes, qui ont, avec l'accord de Washington, organisé des coups d'Etat en douceur, en profitant d'une vague de contestation populaire qu'elles ont intelligemment exploitée». Sur la coïncidence de ces soulèvements avec l'année en cours, il observe que des contestations populaires ou étudiantes dans les pays arabes «se produisent régulièrement», mais que c'est la première fois que l'armée (en Tunisie et en Egypte) a exprimé publiquement son rejet de la «prédation des clans au pouvoir» et souligne que ces révoltes ne sont rien d'autre que «des coups d'Etat militaires prenant le visage de mouvements démocratiques spontanés». Il évoque alors l'idée d'une «manipulation extérieure», en s'appuyant sur le fait que dans ces pays où existe «un net sentiment anti-israélien, aucun slogan anti-israélien ne soit apparu pendant les manifestations», estimant que «c'est bien l'indice d'une révolution sérieusement encadrée». Il étaye ses propos aussi par le fait qu'en Egypte, la «nouvelle équipe» qui comprend le chef d'état-major de l'armée, ainsi que l'ancien chef du service des renseignements, «s'est immédiatement engagée à respecter les accords internationaux signés, notamment les accords de Camp David auxquels est hostile une large partie de la population». Il soutient que l'arrivée au pouvoir de nouveaux dirigeants «bénéficie extérieurement d'une grande légitimité et donne le sentiment d'une rupture profonde avec le régime précédent», relevant cependant que la situation est en réalité «bien différente» et que pour Washington, «c'est un changement dans la continuité, modifiant peu l'équilibre régional», et jugeant que cela «est étonnant pour des révolutions». Il conclut en exprimant ses craintes qu'une partie de la population risque de réaliser qu'elle a été «flouée». D'où, dit-il, «de possibles chocs en retour et une reprise des émeutes».