Ecrit L??uvre raconte une histoire d?amour aux couleurs chaâbies. Zorna ! C?est aussi un prénom à consonance mélodique, érotique, et à l?accent algérois, celui d?une jeune fille à laquelle Lounès, capturé par son charme, tombé sous son sortilège, décide de déclarer un «je t?aime» qui finira dans un balbutiement incompréhensible, muet. Ecrit par Jaoudet Guessouma, Zorna !, paru aux éditions Chihab, raconte à l?algéroise, et aux couleurs chaâbies, une histoire d?amour qui va dans un seul sens. Car si Lounès s?enflamme pour Zorna, celle-ci, en revanche, ne le connaît pas. Elle ignore les sentiments qu?il a pour elle. Elle ignore son existence. Le roman nous rappelle Omar Guetlatou, un film de Merzak Allouache réalisé dans les années 1970, et qui raconte cette passion, forte et douloureuse, que nourrissait ce dernier pour une fille dont il est tombé amoureux, seulement à l?écoute de sa voix enregistrée sur cassette audio. Lounès n?a jamais parlé avec Zorna, il ne l?a jamais approchée, il l?a seulement vue, et il a été foudroyé par son charme. Il est tombé amoureux d?elle. De jour comme de nuit, il ne fait que penser à elle. Son image hante ses pensées, elle l?obsède. Lounès, revêtant la même psychologie que Omar dans le film, devient la proie d?un amour impossible. Le roman raconte la jeunesse algérienne, son malaise et sa frustration. Il présente à travers Lounès et d?autres protagonistes tels que Silima, une société frustrée, qui ne peut se satisfaire, car le poids de l?éducation sociale se fait lourdement sentir, et d?une manière écrasante, car le regard des uns et le jugement des autres pèsent sur chacun, ils freinent, concentrent leur libido. Ils répriment leur refoulé. Silima, tendre et généreuse, s?éprend de Lounès, elle le désire si éperdument qu?elle s?abandonne nonchalamment, et dans un élan érotique, à ses fantasmes. Seule, dans ses illusions lascives, elle s?imagine avec son partenaire, dans ses bras, nue, son corps adhérant à celui qui va la transporter dans des mondes charnels. Elle offre son corps à son bien-aimé, elle lui offre ce qu?elle a de plus précieux : sa virginité. Hélas, ce n?est qu?un fantasme pour elle, un fantasme qui ne sera jamais satisfait. Sa libido s?accroît lorsqu?elle fantasme. Son corps s?enflamme au toucher de sa chair. Son refoulé, longtemps réprimé, fait irruption. Son intérieur se transforme en un brasier incandescent. Silima, seule et malheureuse, se donne la mort parce qu?elle ne vit que dans ses illusions érotiques, dans ses fantasmes chimériques, elle meurt parce qu?elle ne peut consommer l?amour avec Lounès, elle meurt parce qu?elle fait l?objet de moquerie des voisines, en raison de son bec-de-lièvre, une malformation venant «injustement» enlaidir son visage, qui l?empêche de connaître les plaisirs de l?amour. Silima meurt et Lounès aussi. Silima meurt physiquement, et Lounès intérieurement. Ses espoirs s?évanouissent et ses illusions se diluent, s?estompent. Zorna ! présente une rupture dans l?écriture littéraire. L?écrivain a fait l?effort de renouveler le champ thématique, d?apporter une nouvelle forme d?esthétique. Il ne parle ni du terrorisme ni de la politique. Zorna ! est une écriture révélatrice, ancrée dans la société, elle décrit la psychologie de l?Algérienne et de l?Algérien, leur frustration émotionnelle. L?écrivain, pour rendre son roman fluide, a usé d?une écriture douce, sensuelle et sobre. Un roman aéré, léger. Un roman à l?accent d?Alger, qui ne se lit pas, mais s?écoute.