Résumé de la 1re partie n Avec cette année de famine, les animaux se mettent en route et chacun y va de son aliment préféré... Le serpent dit : Plaisanteries que tout cela. Pour moi, rien ne vaut les œufs. Ce jour-là, Dieu m'a comblé ; j'en ai gobé un tas énorme. Si cela ne dépendait que de moi, je ne dépenserais pas mon argent pour des broutilles et ne chercherais que les œufs qu'on n'a pas besoin de mâcher. Ils faisaient de plus en plus de vacarme en raison de l'appétit et la gourmandise qui les possédaient. Hérisson, qui avait l'estomac bien garni, avait la tête cassé de tous ces discours et n'y trouvait aucun sens : autant semer dans la rocaille. De sa petite voix, il dit : Laissez-moi tranquille, imbéciles qui cherchaient l'impossible. On dit : «Les At-Ghorbri, quand ils rêvent de figues, ils en parlent.» Dans la disette où nous sommes, une figue tombée avant maturité, nous ne trouvons pas à nous la mettre sous la dent et vous demandez des denrées hors de prix ; de la viande, des œufs, du lait. La viande est appréciée ; la bonne viande nous l'aimons tous mais elle vient de la montagne infertile. Pauvres de nous, sur qui règne la faim, puissions-nous parvenir à avoir des œufs et du lait ; eux aussi nourrissent la viande ; l'œuf, c'est la chair qui le produit et il engendre la viande emplumée. Le lait vient de la viande et fait grossir nos enfants. Pour la santé, manger un œuf, qui boit du lait mange de la viande. Chacal, tout ce qui disait Hérisson sur la viande, il n'essayait pas de le comprendre ; il écoutait. Il ne détournait pas ses yeux de la bedaine d'Inissi. Celui-ci s'en rendait compte. Il voyait le chacal se gratter le menton, se demandait par où il allait le prendre. Il lui dit : Ta barbe te démange. Ben Yakoub ; puisses-tu faire bientôt un bon repas de viande ; pour toi elle ne manque pas donc d'abord un fruit, pour t'ouvrir l'appétit, supprimer tes tiraillements d'estomac. Il prit une figue de barbarie, avec toutes ses épines et dit à Chacal : Ouvre la bouche et ferme les yeux. Chacal brûlait d'impatience ; il ouvrit la bouche, en fermant les yeux. Hérisson, sans barguigner lâcha la figue qui alla se coincer dans le fond du gosier. Chacal, la gorge pleine d'épines ne pouvait plus respirer : la figue était si bien bloquée dans son gosier qu'il ne pouvait ni parler ni crier. Toutes les bêtes présentes défaillaient de rire. Le crapaud avait un ventre si gonflé qu'il risquait d'éclater. La cigale crissait à en perdre le souffle. Hérisson, déclara : De ce peu d'épines d'une figue de Barbarie, tu ne peux venir à bout ; que serait-ce de moi ? Au revoir ; fasse Dieu que ne tu ne puisses ni l'avaler ni la rejeter. Il battit le sol de ses petites pattes et, en trottinant, il s'en alla.