Alger La version «trop cinéma» n?a pas convaincu le tribunal. Le policier qui a tué son amie enceinte a joué le mauvais rôle. Mardi 6 avril 2004. Le tribunal criminel près la cour d?Alger prononce le verdict d?un jeune policier accusé d?avoir donné la mort à son amie, veuve et mère de deux enfants? Quel fait troublant, penseront certains ! Si troublant en effet que le représentant du ministère public ne put contenir sa colère : «L?accusé a commis un fait des plus graves et je requiers une peine de 20 ans de réclusion criminelle.» Rappelons que l?accusé a fait l?objet d?un premier procès, en date du 13 novembre 2001, et que la cour l?a condamné à la même peine requise aujourd?hui par le représentant du ministère public. Ce second procès a eu lieu après une demande en cassation en date du 25 février 2003. L?accusé, en l?occurrence A. A., 33 ans, exerçant au niveau de l?aéroport Houari-Boumediene en qualité de policier, sera donc de nouveau jugé pour le meurtre de sa bien-aimée, une jeune veuve avec laquelle il entretenait une relation des plus passionnées. Les faits de cette affaire, pour le moins exceptionnelle, remontent au 30 janvier 1999. Zohra téléphone à A. A. : «Il faut que l?on se voie, je crois que je suis enceinte. ? Demain matin, nous irons chez un bon gynécologue, ne panique surtout pas !» Mais le lendemain, Zohra entre dans une colère noire lorsqu'elle s?aperçoit que son ami a pris rendez-vous chez un gynécologue de sexe masculin. Elle aurait préféré se faire ausculter par une femme. Ce sont là, bien entendu, les déclarations de l?accusé depuis le jour de son arrestation. En ce mardi 6 avril 2004, il tient les mêmes propos face à la cour. Ainsi, selon lui, pour calmer son amie, il lui aurait suggéré de déjeuner et de décider ensuite. Après un copieux repas, Zohra ne voulait plus voir de médecin. Arrivés au niveau du pont de Kharrouba, elle aurait essayé de mettre fin à sa vie en tentant de se jeter dans le vide. «Pourquoi aurait-elle réagi ainsi ? ? Je pense qu?elle était désespérée, monsieur le président. ? Qu?avez-vous fait à ce moment-là ? ? Je l?ai empêchée de se suicider en la serrant très fort dans mes bras? Tout s?est passé très vite, elle a profité de cette circonstance pour prendre mon arme. ? Vous ne pouviez pas l?en empêcher ? ? J?ai été surpris ! je vous le répète, tout s?est passé à une vitesse inouïe ! J?ai deviné qu?elle voulait se tuer. Chacun de nous tirait l'arme à lui. J?essayais vainement de la lui prendre des mains et c?est là que le coup de feu est parti pour la toucher à la tête. Elle est tombée à mes pieds? C?était horrible? ? Pourquoi avez-vous pris la fuite ? ? J?ai paniqué, monsieur le président. ? Qui a tiré, elle ou vous ? ? Je ne sais pas? c?est arrivé si vite.» Au terme des délibérations, la cour revient afin de rendre son verdict : A. A. se voit condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour homicide volontaire avec préméditation ainsi qu?à une lourde amende versée à la famille de la victime, mère de deux enfants? La cour n?aura certainement pas été dupe de la version un peu trop «cinéma» de l?accusé.