Position - Alors que les résultats définitifs de l'élection n'ont pas encore été publiés, le parti Ennahda se déclare favorable à un Gouvernement démocratique d'alliance nationale. «Il est tout à fait naturel que le parti qui a obtenu la majorité dirige le gouvernement», a déclaré, hier, mercredi Rached Ghannouchi, dirigeant du parti islamiste d'Ennahda donné vainqueur de l'élection de dimanche dernier en Tunisie. «Le gouvernement doit être composé le plus tôt possible, dans un délai qui n'excède pas un mois», a-t-il ajouté. Ennahda a présenté pour le poste de Premier ministre la candidature de son numéro 2, Hamadi Jebali. «Nous sommes pour une grande alliance nationale qui aboutira à un gouvernement démocratique», a souligné M. Ghannouchi. Quant au prochain président de la République, M. Ghannouchi, qui a déjà déclaré qu'il ne serait pas candidat, a estimé que ce poste devrait être occupé par «une personnalité qui a milité contre la dictature». Sur la radio Express FM, M. Ghannouchi a insisté pour mettre en avant l'identité arabe de la Tunisie, «une affaire nationale qui concerne tout le monde, pas un seul parti». «Notre langue, c'est la langue arabe. Nous sommes devenus franco-arabe, c'est de la pollution linguistique», a-t-il déploré, alors que le dialectal tunisien mêle français et arabe, le français étant encore largement pratiqué depuis l'indépendance en 1956. «Il faut un dialogue national sur l'éducation», a poursuivi celui dont le parti a déjà fait comprendre qu'il voulait ce ministère dans le futur gouvernement. «Les lignes rouges c'est encore une fois les libertés publiques, les droits de l'homme, les droits de la femme, de l'enfant et sur cela nous ne pactiserons jamais, jamais», a déclaré Moncef Marzouki, leader du parti de gauche nationaliste Congrès pour la République (CPR). De son côté, la coalition de gauche du Pôle démocratique moderniste (PDM) a assuré qu'elle resterait «vigilante». «Le peuple n'a pas donné un chèque en blanc à Ennahda», a souligné Jouneidi Abdeljawad, un des responsables d'Ettajdid, principale force du PDM. La commission électorale (Isie) a confirmé hier mercredi l'avance d'Ennahda après les résultats de 14 des 27 circonscriptions du pays dépouillées. Ennahda a remporté 44 sièges dans ces circonscriptions, selon un décompte à partir des résultats de l'Isie. Si l'on y ajoute les résultats du vote à l'étranger, le parti islamiste totalise pour le moment 53 des 217 sièges de l'Assemblée constituante. Il devance le Congrès pour la République (CPR, gauche nationaliste) qui recueille en tout 18 sièges, dont 4 à l'étranger. La Constituante élue dimanche par les Tunisiens, devra prioritairement désigner un nouveau président de la République, qui lui-même formera un exécutif jusqu'aux prochaines élections générales. Enquête sur l'étrange percée du parti de l'homme d'affaires Haamdi La commission électorale indépendante (Isie) et des partis politiques enquêtent sur le «hold-up électoral» du richissime homme d'affaires tunisien Hechmi Haamdi, dont la liste a fait une percée inattendue, a déclaré hier mercredi un responsable de la coalition de gauche PDM. Les listes Al Aridha Chaabia (Pétition populaire pour la liberté, la justice et le développement) de Hechmi Haamdi, totalement absentes sur le terrain pendant la campagne, sont au coude à coude avec le CPR (Congrès pour la république) de Moncef Marzouki, derrière les islamistes d'Ennahda, selon des résultats partiels. La «Pétition populaire» arrive notamment en tête à Sidi Bouzid, la ville du centre du pays où a commencé la révolution. La personnalité de M. Haamdi et ses moyens financiers ont suscité les soupçons, plusieurs dirigeants politiques suspectant le RCD (ex-parti de Ben Ali) d'être à la manœuvre. «Les archives de l'agence tunisienne de communication extérieure (ancien organe de propagande du régime de Ben Ali, nldr) ont déjà révélé que cet homme avait reçu 150 000 dollars en contrepartie de services rendus au régime», a affirmé M. Ben Fadhel. «L'Isie est en train de passer au peigne fin sa trésorerie», a indiqué une source proche de cette commission. M. Haamdi avait également rejoint la liste des «Mounachidine», terme désignant tout ceux qui ont appelé Ben Ali à se représenter à la présidentielle de 2014, selon M. Ben Fadhel.