Séparation - Un divorce sur trois finit par une rupture complète, les enfants perdent alors tout contact avec un de leur parents. En général, le père... Qu'ont-ils en commun ces enfants du divorce ? Ils vivent des tristes jours... Une première dispute à table, papa jette sa serviette à terre ou un beau matin, tout à coup, maman claque la porte de l'appartement en pleurs. Puis des silences, des réconciliations, des sourires crispés et de nouveaux éclats, des larmes et des coups parfois, des cris toujours. Cela dure quelques semaines, plusieurs mois, des années, jusqu'au jour où les enfants apprennent la nouvelle qui tombe comme un couperet. Les parents décident de divorcer. «Le drame est que les enfants doivent se reconstruire loin du schéma naturel de la famille», résume une avocate rencontrée entre deux audiences au tribunal d'El-Harrach. Peut-on pour autant trouver à tous les enfants de parents divorcés des points communs ? Des sociologues observent que le taux d'enfants de parents divorcés dans les centres de redressement est élevé et croient, par conséquent, juste d'affirmer : «Parents séparés, enfants perturbés.» Une causalité qui laissera des traces dans la recherche psychologique. Aujourd'hui, sur l'ensemble des couples qui divorcent, deux tiers ont des enfants. L'âge moyen d'un enfant au moment du divorce est de 6 ans. Psychologues et sociologues ont donc repris toutes leurs études et passé au crible les résultats scolaires de ces enfants, leur stabilité. «Ces études rendent agnostiques», résume Mme Farida Berdjane, une sociologue dans un centre psychologique à Alger. «Le divorce n'explique rien, il est une variable parmi d'autres. Le seul fait déterminant, c'est la manière dont il se déroule. On ne trouve aucune expérience commune explicative d'un destin social des enfants du divorce. En bref, ils n'ont en commun que d'être des enfants de parents séparés», ajoute notre interlocutrice. Les meilleurs travaux menés sont consacrés aux résultats scolaires de ces enfants. «Ne me dites pas que vos parents sont divorcés, donnez-moi plutôt leur niveau d'études et je vous prédirai votre parcours scolaire», a conclu notre interlocutrice. «Des parents divorcés à fort bagage socioculturel auront des enfants ayant suivi à terme de bon parcours scolaire. Des parents unis jusqu'au dernier souffle sans bagage scolaire trouveront des difficultés à achever leurs études», confirme Redouane Mokhtari, un autre sociologue. «Huit enfants de divorcés sur dix n'ont aucun retard scolaire, 400 sont en avance», ajoute notre source. Des taux en tous points égaux à ceux des enfants de parents divorcés élevés chez leur père, sont d'ailleurs un peu moins bons à l'école que ceux qui vivent avec leur mère.» Que doit-on conclure ? Que ce qui détermine les conséquences d'un divorce sur les enfants, c'est «le milieu socioculturel d'origine», reprend M. Mokhtari. Il explique ainsi que les enfants de parents divorcés se remettront sans mal de la séparation de leurs parents à trois conditions : que leurs parents, même séparés soient toujours dotés d'un bon capital économique, sachant qu'un divorce fait chuter le revenu du conjoint d'environ 40%. Il explique aussi que leurs parents conservent un bon tissu relationnel, ce qui est utopique dans notre société, un réseau actif d'amis, de tantes et cousins, de voisins, de grands parents qui permettront aux enfants de vivre parmi d'autres sans souffrir des stigmates de l'isolement. Troisième condition, que les enfants maintiennent au-delà de la dislocation conjugale, un contact régulier avec leurs deux parents. Cette condition, ajoute notre interlocuteur, paraît la plus facile à remplir. «Il suffit que les parents le veuillent.» Et pourtant, c'est la condition la plus délicate à remplir. Si 0,62% des conjoints divorcés entretiennent par la suite des relations régulières, plus de 99% rompent tout contact. Dans environ 9 divorces sur 10, la rupture est complète, les enfants perdent tout lien avec un parent. En général, avec leur père. «Un enfant se construit dans une relation quotidienne avec ses deux parents», rappelle Hafida R., une spécialiste en affaires sociales, qui s'efforce avec beaucoup d'énergie, aidée par de plusieurs psychologues, à inciter les parents à demeurer en contact avec leur progéniture au-delà de leur séparation. Elle a pris à ce titre une série de mesures moins symboliques qu'elles n'y paraissent : double carnet scolaire pour les enfants de parents divorcés, double carnet de santé. «Rares sont ceux qui admettent une telle proposition», nous dit-elle, dépitée.