Pierre Chanal attendra en détention, à l'hôpital puis en prison, son procès pour les séquestrations et les assassinats de trois des huit «disparus de Mourmelon», renvoyé à une date ultérieure par la cour d'assises de la Marne en raison de son état de santé. La cour a suivi les réquisitions de l'avocat général Pascal Chaux sur les problèmes de procédure posés après la tentative de suicide médicamenteux de l'ancien adjudant-chef, lundi dernier, et l'embolie pulmonaire qui l'a affecté dans la nuit de samedi à dimanche. Toutes les parties s'accordaient sur le point d'un renvoi du procès. Me Eric Dupont-Moretti, avocat de l'une des parties civiles, estimant même «qu'il en va de l'image de la justice (...) car elle n'est pas la forme endimanchée de la vengeance. (...) Il faut un accusé, épicentre du procès, qui puisse s'expliquer face aux accusations». Cette décision a été saluée par Me André Buffard, avocat de Pierre Chanal, qui a rappelé que «la dignité de la justice passe aussi par le respect des droits de la défense». Les avis ont divergé lorsque le défenseur de l'ex-adjudant a demandé la remise en liberté sous contrôle judiciaire de son client. En outre, il estimait qu'en liberté «au milieu des siens, il avait moins de risques» d'attenter à ses jours qu'en prison. Selon lui, «aucune mesure de surveillance ne parvient à éviter le suicide d'une personne qui a la volonté de mourir (...). Le risque d'une nouvelle tentative de Pierre Chanal demeure, car il n'a pas confiance en la justice, et estime qu'il a été condamné avant d'être jugé par un jury populaire de la Marne». L'avocat général avait estimé que la justice devait «prendre des garanties» et demandé le maintien de la détention de Pierre Chanal. Me Gérard Chemla, avocat de la majorité des familles des huit disparus, avait convenu de l'état de santé du prévenu tout en dénonçant «la mise en scène de cette semaine de non-procès (...) notamment par la publication du courrier de Chanal à la présidente de la cour, où il affirmait ne pas vouloir comparaître». «Pierre Chanal est désormais sous la responsabilité de la justice, c'est à elle de s'assurer qu'il sera à même de comparaître, valide, le plus tôt possible (...) car chaque jour de plus dans cette affaire est un jour de trop.» Son confrère et associé Me Vincent Durtette, avait auparavant exprimé «l'amertume des parties civiles (...) et leur crainte sincère que le procès n'ait pas lieu». La cour, après avoir délibéré plus d'une heure, a décidé que Pierre Chanal resterait détenu en milieu hospitalier puis carcéral, jusqu'au procès qui aura lieu en octobre. Il devra répondre des séquestrations et assassinats de Patrice Denis, disparu en août 1985, Patrick Gache, disparu en avril 1987 et Trevor O'Keefe, disparu en juillet 1987, et dont le corps avait été retrouvé en août 1987. L'ex-adjudant chef a bénéficié de cinq non-lieu pour les cinq premières disparitions de la série de huit, allant de 1980 à 1987.