Résumé de la 1re partie - Manon qui a très mal accepté la naissance de sa sœur Charlotte, tombe gravement malade... Elle est terriblement fatiguée, chaque geste, même marcher, lui est pénible. Ses parents ne semblent pas s'en inquiéter. Pour eux, la fièvre est passée, c'est ce qui compte. Et puis, leur principale préoccupation est maintenant Charlotte. Elle est vraiment ravissante : elle sera aussi jolie que Manon ! Marion, justement, n'aime pas Charlotte. D'abord parce que ce n'est pas le petit frère qu'elle voulait, et puis le nouveau-né est associé à ses souvenirs de maladie, à ces moments terribles qu'elle a passés dans sa chambre, croyant qu'elle allait mourir. Malgré l'insistance de ses parents, elle refuse d'aller voir sa sœur dans son berceau, elle s'en va ou elle boude quand on parle d'elle. D'ailleurs, depuis sa fièvre, son caractère a changé. Elle est morose, irritable... Quelques mois passent encore et Manon se rend compte que, décidément, cela ne va pas. Il y a toujours cette langueur qui ne la quitte pas, et puis il y a aussi autre chose, une sensation étrange, qu'elle a du mal à définir... C'est un matin, tandis que la femme de chambre lui passe sa robe, qu'elle a le premier soupçon. Cette robe ; cela fait longtemps qu'elle la porte et elle lui va toujours. On dirait, oui, on dirait... qu'elle ne grandit plus ! Quand la domestique est partie, Manon se saisit d'un petit couteau, se place contre un mur de sa chambre et fait une entaille à hauteur du sommet de sa tête. Les jours suivants, elle va se mesurer devant l'encoche et c'est chaque fois la même désespérante constatation : elle arrive à la même hauteur... A la fin, elle va confier son angoisse à sa mère. — Maman, je crois que je ne grandis plus... Pernelle Lefranc lui répond quelques phrases pour la rassurer et lui promet qu'elle va faire venir le docteur. Ce dernier arrive le soir, alors qu'elle est déjà couchée. Il lui dit, lui aussi, quelques paroles rassurantes et s'en va. Pourquoi faut-il que Manon ait la curiosité de le suivre ? Elle descend l'escalier derrière lui à pas de loup et le voit entrer dans la salle à manger où l'attendent ses parents. Elle colle son oreille à la porte... Les voix sont nettement distinctes. — La fièvre maligne de votre fille a arrêté sa croissance. Le cas est rare, mais s'est déjà produit. La médecine est malheureusement impuissante. — Vous ne voulez pas dire que notre fille sera... naine ? — Hélas... Il y a un silence accablé et la voix de son père : — Moi qui voulais lui faire épouser un gentil-homme ! Un nouveau silence se fait, puis sa mère pro-nonce cette phrase terrible : — Heureusement, il nous reste Charlotte. Manon Lefranc remonte en courant l'escalier... Naine... Elle sera une naine ! Le beau mariage, les bals à Versailles, la cour, le roi, ce sera pour Charlotte ! Elle, elle restera à la maison. Ou plutôt non : on en fera une religieuse. On l'enfermera dans un couvent où personne ne pourra la voir. Les robes, les bijoux, les beaux messieurs, ce sera pour Charlotte. Elle passera sa vie au milieu de vieilles femmes tristes et laides. Tout sera pour Charlotte et rien pour elle ! Dès ce jour, les choses changent dans la maison Lefranc. Manon se met à haïr Charlotte, tandis que ses parents se détachent d'elle. C'est qu'elle ne les intéresse plus. Les Lefranc ont, en effet, de grands projets ou, tout du moins, un grand projet : entrer dans la noblesse. Grâce à leur fortune, ils peuvent espérer, comme cela se pratique à l'époque, marier une de leurs filles à l'héritier d'une grande famille désargentée. Puisque ce n'est plus possible avec Manon, cela se fera avec Charlotte. Charlotte porte désormais tous leurs espoirs, Manon n'est plus rien. (A suivre...)