Inquiétudes - Les affrontements entre pros et anti-syriens au Liban suscitent de grandes inquiétudes dans ce pays multiconfessionnels longtemps sous l'emprise de la Syrie. Le 12 mai dernier, l'arrestation d'un islamiste sympathisant de la révolte syrienne met le feu aux poudres à Tripoli, la grande ville du Nord libanais : des accrochages entre sunnites anti-Assad et alaouites prosyriens font ensuite dix morts. Un dignitaire sunnite critique de Damas est également tué par l'armée, provoquant des heurts entre pro et antisyriens à Beyrouth qui font deux autres morts. L'agence officielle libanaise ANI a en outre annoncé hier mardi l'enlèvement en Syrie d'un groupe de pèlerins chiites libanais par les rebelles. Cette annonce a poussé des milliers de personnes à manifester dans la banlieue sud, à majorité chiite, de Beyrouth pour demander la libération des pèlerins, bloquant plusieurs axes, notamment l'ancienne route menant à l'aéroport, avec des pneus en feu et des ordures. Hassan Nasrallah, le chef du mouvement chiite libanais Hezbollah, qui domine le gouvernement et appuie le régime syrien, a immédiatement appelé ses compatriotes à la retenue après cet enlèvement et les manifestations qu'elle a provoquées. «Je vous appelle tous à la retenue, personne ne doit se livrer à des actes individuels en bloquant des routes ou en commettant des violences», a-t-il martelé sur la chaîne de ce parti. «Des contacts ont été pris avec les autorités syriennes et avec d'autres pays influents dans la région pour assurer leur libération. Nous travaillerons jour et nuit pour que nos bien-aimés reviennent parmi nous», a encore assuré M. Nasrallah. A la lumière de ces évènements, le Liban est devenu l'otage du conflit dans la Syrie voisine après cette série d'incidents meurtriers impliquant des adversaires et des sympathisants du régime du président Bachar al-Assad, selon des experts. «Ces incidents ont transmis un message très clair : on peut faire exploser le Liban à tout moment. Le message a été reçu», affirme un professeur de sciences politiques à l'Université libanaise. Selon lui, «divisé entre pro et antisyriens, le Liban est devenu l'otage de la crise» qui secoue le pays voisin depuis 14 mois. Selon les analystes, il existe un lien direct entre les violences au Liban et les récentes accusations des autorités syriennes de plus en plus irritées par le soutien aux rebelles syriens dans le nord du Liban, frontalier de la province de Homs. «Damas voit désormais une partie du Liban comme son ennemi», estime un professeur de sciences politiques à l'Université américaine de Beyrouth. L'ambassadeur syrien auprès des Nations unies, Bachar Jaafari, a affirmé récemment que «certaines régions du Liban proches de la frontière sont devenues un nid de terroristes d'Al-Qaïda et des Frères musulmans». Même l'ONU a indiqué avoir reçu des informations sur l'existence de trafic d'armes entre les deux pays et plusieurs personnes impliquées ont été arrêtées au Liban. Libération imminente des pèlerins libanais Le groupe de pèlerins chiites composé de 13 Libanais chiite enlevé dans la province d'Alep (Syrie), dans le nord de la Syrie, alors qu'ils revenaient dans leur pays après un pèlerinage en Iran, va être libéré «dans les prochaines heures», a assuré dans la nuit de mardi à mercredi le ministre libanais des Affaires étrangères. «D'après les informations qui m'ont été fournies par un pays arabe, les kidnappés seront libérés dans les prochaines heures», a affirmé le ministre. L'auteur de l'enlèvement est «une des factions de l'opposition syrienne armée», a indiqué le ministre. «Nous étions 36 femmes parmi le groupe de pèlerins», a raconté l'une des femmes pèlerins qui faisait partie du groupe enlevé arrivée hier à l'aéroport international de Beyrouth. «Après avoir traversé la frontière turco-syrienne, on a vu une voiture blanche dans laquelle se trouvait des hommes armés avec des kalachnikovs. Ils nous dit qu'ils voulaient nous protéger des bombardements de l'armée syrienne», ajoute-t-elle. «Puis ils ont menotté les hommes et les ont alignés au mur», se souvient-elle. La plupart des femmes interrogées par la presse sur place ont assuré que les hommes armés s'étaient identifiés comme «des membres de l'ASL». «Ils nous ont terrorisées», a dit une autre.