Constat n Enraciné dans la culture du Sud-Ouest algérien, le diwan ou le gnawi est de nouveau mis à l'honneur à l'occasion du 5e Festival culturel international de musique diwan. Ce genre musical s'est imposé en une décennie sur la scène musicale du nord de l'Algérie et s'attire les faveurs d'un public de connaisseurs, jeunes pour la plupart et de plus en plus exigeants. Au départ, musique des esclaves déportés de certains pays d'Afrique subsaharienne (Soudan, Mali, Guinée...) vers le Maroc, le diwan est un style mystique basé sur des chants incantatoires accompagnés d'un jeu instrumental au gumbri, tambour et karkabou. Comme le précisent plusieurs adeptes de ce style, le diwan n'est que la partie émergée d'une culture ancestrale appelée «tagnaouit» et centrée sur un maâllem (maître), et la hadra, appelée aussi lila ou diwan, une forme de rituel mystique profond. Transmis oralement, les textes de ces chants rituels parfois composés dans les dialectes des pays du Sahel, n'ont jamais été transcrits ni même traduits, alors même que les cérémonies du diwan sont soumises à des règles très strictes que les maâlmine (maîtres) transmettent à leurs disciples (Guendouz), sur des générations depuis des siècles. C'est ainsi que le diwan a réussi à survivre près de cinq siècles durant, traversant, sans grands dommages, la période coloniale. Après l'indépendance, le diwan a conservé ses pratiques mystiques et le caractère intime et restreint, quasi ésotérique, de ses cérémonies organisées dans le sud-ouest et quelques autres régions d'Algérie où vivent de petites confréries d'inspiration soufie. Vers la fin des années 1990, il sort de l'ombre, grâce à «Gaâda Diwan Béchar» et à la fusion de diwan, reggae et raï du groupe «Gnawa diffusion», créé en France au milieu des années 1990, qui le propulsent sur la scène musicale algérienne. Dans un style ancré dans le terroir poétique pour l'un, plus festif et engagé pour l'autre, les deux formations ont réussi à «retoucher» cette musique mystique pour la rendre accessible à un large public de profanes, de plus en plus demandeur de ce genre. Selon Tayeb Laoufi, membre fondateur du groupe «Gaâda Diwan Béchar», le public était «prédisposé» car il avait «soif de culture». Le «matraquage des musiques venues du Moyen-Orient et d'Occident», dit-il, a relégué le patrimoine musical maghrébin au rang de sous-culture et de simple folklore. «Quelques groupes se sont attelés à changer le regard sur nos cultures musicales et la jeunesse algérienne a suivi, découvrant, du coup, qu'elle pouvait, aussi, s'éclater avec des musiques du terroir», se félicite le musicien. Au début, beaucoup d'observateurs assimilaient la fulgurante ascension du diwan à un simple phénomène de mode, mais les deux groupes précurseurs de ce style sont la preuve de leur longévité et l'engouement grandissant du public pour leurs spectacles. Pour rappel, le Festival culturel international de musique diwan se déroule à Alger depuis le 4 juillet et ce, jusqu'au 14. R. C. / APS