Récit - «Elle a subitement disparu et la dame m'oblige, à l'instar d'autres enfants, à lui rapporter de l'argent en échange du gîte et du couvert.» À 12 ans, Karim est chef de famille, il ne va plus à l'école et ne joue plus. Il est mécanicien dans un atelier près de chez lui. Son père est mort après une longue souffrance des suites d'un cancer, alors qu'il était en bas âge. Il aide sa mère, femme de ménage, à subvenir aux besoins de sa famille. «Ma mère doit nourrir une famille de cinq personnes avec un salaire de 500,00 DA par jour, ce qui relève de l'impossible. Malgré moi, je suis devenu chef de famille», dit-il. Un autre cas, celui d'une fillette de 13 ans à peine. «Je m'appelle Salima, j'ai 13 ans, nous sommes 10 dans la famille, je voudrais vraiment pouvoir aller à l'école un jour comme les autres filles. Je passe mes journées à garder les vaches et les chèvres de mon père. J'aide aussi ma mère dans les travaux domestiques.» Un cas d'inconscience d'un père qui ne mérite pas cette appellation. Karim, est un autre cas de ces enfants privés d'école. «Ma mère m'a confié à une nourrice dès mon plus jeune âge. Au début, elle venait de temps à autre me voir et s'acquitter des droits de garde. Elle a subitement disparu et la dame m'oblige, à l'instar d'autres enfants, à lui rapporter de l'argent en échange du gîte et du couvert», a confié Kamel, 11 ans, vivant chez une dame depuis neuf années, demeurant en plein centre-ville de la wilaya de Tipaza. L'histoire de Naïma, autre cas de ces enfants privés d'un droit élémentaire : l'école. Elle souligne le douloureux vécu de cette frange de la société. Cette fillette de 14 ans, a déjà le visage ridé, le regard triste. Sur son visage, le temps a peint les traits de la misère. «J'ai travaillé pendant plus de 6 ans comme domestique dans divers lieux. Mes parents sont vieux maintenant. J'ai enduré l'exploitation, la misère, le mépris des autres pour les nourrir. Le fait de n'être jamais allée à l'école m'attriste. Mais, ce qui me chagrine le plus, c'est d'entrevoir, dans le regard des enfants comme moi, la honte que mon travail leur causait. Cela sans évoquer les misères que m'a fait vivre le mépris des gens pour qui je travaille», raconte-t-elle.