Rejet - L'option de la guerre privilégiée par des chefs d'Etat africains est loin de réunir l'unanimité que la Cédéao souhaite. Ansar Dine, l'un des groupes islamistes armés occupant le nord du Mali, et la rébellion touareg du Mnla ont fermement condamné hier lundi, le choix fait par des dirigeants africains d'envoyer 3 300 militaires dans ce pays . «La décision des chefs d'Etats africains, poussés par la France, constitue un mauvais choix et un parti pris contre une partie des populations du Mali», a déclaré Iyad Ag Ghaly, le chef d'Ansar Dine, à l'agence de presse en ligne mauritanienne Sahara Médias. Il a fustigé une «erreur historique» et assuré qu'une guerre aurait des conséquences pour «tous les peuples de la région». Mouvement surtout composé de Touareg maliens et appliquant strictement la charia dans les zones sous son contrôle (amputations, lapidations, coups de fouet), Ansar Dine s'est engagé dans des négociations avec le président burkinabè Blaise Compaoré, médiateur de la Cédéao. Il avait donné des gages avant le sommet en appelant au dialogue avec les autres groupes armés et avec Bamako, et en proclamant son rejet du «terrorisme». Une façon de prendre ses distances avec ses alliés jihadistes d'Al-Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi) et du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Ses représentants à Ouagadougou ont repris hier lundi, leurs discussions avec le chef de la diplomatie burkinabè, Djibrill Bassolé. «On va continuer à donner la chance aux négociations», a indiqué l'un d'eux. Le Mouvement national de libération de l'Azawad (Mnla), via ses responsables présents aussi à Ouagadougou, a également affiché son opposition à une guerre. «Nous refusons toute intervention sur le territoire de l'Azawad (nord du Mali, ndlr) sans règlement politique du différend qui nous oppose au Mali», a expliqué Mahamoudou Djeri Maïga, un responsable du Mnla. Favorable à l'autodétermination après avoir renoncé à ses projets sécessionnistes, cette rébellion touareg est laïque. Mais elle a été évincée sur le terrain par les islamistes et est divisée sur l'opportunité de l'usage de la force. Dans les pays voisins, certains ont aussi fait entendre leur voix pour mettre en garde contre une solution militaire. Les voisins du Mali seraient victimes d'un «volcan aux cendres incandescentes», a averti le président de l'Assemblée nationale de Mauritanie, Messaoud Ould Boulkheir. Puissance régionale incontournable, l'Algérie a tenu à souligner, de son côté, qu'une sortie de crise par le dialogue reste «tout à fait possible». Les dirigeants africains ont, pour rappel, approuvé l'envoi d'une force militaire internationale de «3 300 soldats» pour «un an», jugeant le recours à la force «indispensable contre les réseaux terroristes et de criminalité transnationale». Ce plan doit être transmis, via l'Union africaine, avant la fin du mois en cours aux Nations unies, qui auront le dernier mot et à qui la Cédéao renvoie la charge de réunir le financement. Le sommet d'Abuja a insisté sur «le rôle de leadership de la Cédéao dans le déploiement de la force internationale sous conduite africaine». Mais ce commandement africain pourrait provoquer des grincements de dents du côté des autorités maliennes, jalouses de leur souveraineté. «Nous allons demander des éclaircissements», a indiqué une source proche du ministère malien de la Défense, pour qui «il n'a jamais été question que ce soient d'autres (que le Mali) qui dirigent la force».