Paradoxe - Les citoyens ne parviennent pas à comprendre cette différence et insistent sur la nécessité de remédier à la situation. L'allocation voyage en vigueur en Tunisie et au Maroc dépasse de loin la valeur de celle appliquée en Algérie. «Pourtant, ces deux pays voisins sont pauvres par rapport au nôtre !», s'insurgent Saïd et Hamid, deux jeunes croisés au marché parallèle de la devise à Port-Saïd (Alger). «Ces gens-là ne vendent certainement pas leur allocation touristique ! Voilà où l'Etat doit intervenir et non pas en nous donnant une somme modique lorsqu'on veut se rendre à l'étranger», intervient un autre citoyen, agacé. La comparaison avec la Tunisie et le Maroc est sur toutes les lèvres, certains allant jusqu'à qualifier cette situation de «honteuse». Il est vrai que les Tunisiens et les Marocains sont beaucoup plus gâtés que les Algériens en la matière et se permettent d'avoir des sommes à même de leur permettre de subvenir convenablement aux dépenses lors de leurs déplacements à l'étranger. En Tunisie, l'allocation voyage est estimée à 4 000 euros (6 000 dinars tunisiens), soit vingt-six fois la somme allouée aux Algériens ! Et avec tout cela, des voix s'élèvent dans ce pays pour porter cette allocation à au moins 7 000 euros. Au Maroc, l'allocation voyage est estimée à 2 000 euros, l'équivalent de treize fois les 150 euros permis en Algérie. «Nous voulons être traités mieux que nos voisins, ou au moins à égalité. L'Algérie n'a rien à envier à ces deux pays, au contraire elle est plus riche. C'est l'image de notre pays qui en pâtit avec cette situation. Jusqu'à quand serons-nous la risée des autres ?», lance Tahar rencontré au niveau d'une agence de la Banque extérieure d'Algérie (BEA), à Alger-Centre. «J'ai été contraint d'acheter 1 300 euros au marché informel. J'ai placé cette somme dans mon compte devises pour ne pas être inquiété aux frontières», avoue ce pharmacien qui doit se rendre en France pour soigner son épouse d'un problème d'infertilité. «Les soins coûtent cher et si je compte sur les 150 euros, je resterai chez moi», regrette-t-il. Tahar n'est qu'un échantillon de ces centaines de milliers de citoyens qui se débrouillent, comme ils peuvent, pour voyager et régler leurs affaires. Nos interlocuteurs s'élèvent unanimement contre cette allocation «symbolique» qui les met dans des situations inconfortables. «C'est l'image du citoyen algérien qui est altérée. Récemment, des Tunisiens se sont moqués de nous. Ils insistaient sur le fait que notre gouvernement ne nous fait pas confiance, même lorsqu'on se déplace à l'étranger ! Nous étions vraiment gênés et nous n'avons rien trouvé à dire, puisqu'ils sont mieux lotis que nous. C'est dommage pour un pays qui compte des milliards de dollars de réserves de change», se désolent deux jeunes employés d'une multinationale qui viennent de rentrer d'une mission de dix jours dans ce pays voisin. Pour eux, l'augmentation de l'allocation voyage «doit constituer une question de nif (honneur)».