Résumé de la 2e partie - Le jeune souverain va progressivement d'abord, puis plus brutalement ensuite, imposer la première religion hénothéiste connue de l'histoire, privilégiant le culte du disque solaire Aton. Avant Akhénaton, Aton était un dieu mineur dont l'existence est attestée dès le Moyen Empire. Au Nouvel Empire, Thoutmôsis III s'était placé sous sa protection et Amenhotep III, dont l'une des épithètes était «Rayonnement d'Aton», avait encouragé le culte du dieu. En l'an IX de son règne, Akhénaton ira plus loin, dans une apparente radicalisation de sa réforme antonienne : il ordonne de détruire, dans les principales régions névralgiques du royaume, les images de culte des anciennes divinités, à l'exception notable de Rê, afin de mener à bien son «opération» magique, effaçant l'expression des principes anciens pour faire place à la fonction nouvelle qu'il incarnait. En martelant les noms des dieux, dans un système de croyances où le verbe est créateur, il annule leur faculté de s'incarner et occulte leur influence. Il fait ainsi du Disque solaire le dieu universel, l'Unique «qui n'a pas son pareil», le démiurge qui répète son acte créateur à chaque lever du soleil. Pour souligner la royauté céleste d'Aton, le nom du dieu est inscrit dans des cartouches : il est «Rê-Horakhty qui se réjouit dans l'horizon», «Le Souverain (heka) des deux horizons». On se trouve désormais en présence d'un monothéisme, véritable révolution religieuse dans l'Antiquité. Le roi est l'image terrestre d'Aton, son «enfant parfait», avec la grande épouse royale, Néfertiti, il est le seul intermédiaire entre la divinité et les humains. A l'instar de la triade Amon – Mout – Khonsou, le couple royal forme avec Aton une triade divine adorée dans les demeures des hauts dignitaires. Le peuple, quant à lui, perpétue dans une grande majorité les cultes privés traditionnels. L'art amarnien se caractérise par un style naturaliste où abondent les plantes, les fleurs et les oiseaux, mais aussi, dans les cas les plus extrêmes, par un «académisme de cauchemar» (J. Leclant), poussant jusqu'à la caricature apparente. Ainsi, les statues colossales découvertes dans le temple d'Aton à Karnak sont à l'opposé de l'art classique idéalisant : elles montrent le roi avec un corps d'androgyne aux hanches exagérément larges, le ventre proéminent, la tête allongée et les lèvres charnues. D'autres statues le montrent apparemment nu, mais asexué. Sur un bas-relief conservé à l'Ägyptisches Museum de Berlin, Néfertiti et les petites princesses sont représentées avec le même visage étiré en longueur, en tout point identique à celui d'Akhénaton qui leur fait face. (A suivre...)