Résumé de la 3e partie - Chez Brahim, Yasmina et sa mère assistent à de grandes scènes de tristesse et de pleurs. Maman ne nous fait pas de tbehdil ! Partir maintenant, sans veiller avec cette pauvre La Zbida ! Si tu veux partir seule, vas-y ! Mais Yasmina sait que sa mère est incapable de retourner seule en ville. Cette dernière a beau insister, Yasmina reste de glace. — Et ton mari, que va-t-il dire ? — Je lui ai dit que je passais la nuit ici... Il viendra nous chercher demain, après l'enterrement. Il va y assister aussi... — Je n'aurais jamais dû t'écouter, chuchote Douja à l'oreille de sa fille, et elle s'appuie à un coussin et se mure dans un silence boudeur. Après le dîner, chorba et couscous auxquels Douja fait honneur l'appétit aiguisé par l'air pur de Sidi Mabrouk, les tolba commencent à réciter des versets du Coran, assis autour de la dépouille mortelle. Les femmes se sont retirées dans d'autres pièces. Certaines sont silencieuses, d'autres chuchotent. Les plus vieilles, recroquevillées sur des matelas, fatiguées, tentent de trouver un semblant de sommeil. Il est plus de minuit quand Douja ouvre les yeux, se rassied et chuchote à sa fille : — Mon dos me fait mal. Je crois qu'il s'est cassé ! A cause de toi... Je vais faire un tour dans la cour ! — Yasmina, dit-elle à l'oreille de sa fille, je sais que tu ne vas pas me croire, mais j'ai vu quelque chose d'effroyable ! Yasmina qui somnole à demi, adossée au mur, ouvre les yeux et reste frappée par l'expression du visage de sa mère. La peur se lit dans ses yeux, son visage est blanc, ses lèvres tremblantes. — Assieds-toi, maman, dit-elle. Bismi Allah ! que t'arrive-t-il ? Voyons, reprends-toi... Tu veux un verre d'eau ? — Non, malheureuse, fuyons pendant qu'il est encore temps ! Fuyons, je t'avais bien dit que je ne voulais pas venir ici, mais tu ne m'as pas écoutée... Fuyons ou restons toutes les deux tout près de la grande porte ! Viens, viens donc ! — Pourquoi ? Douja rapproche son visage livide de celui de sa fille et lui dit, dans un souffle : — Brahim a bougé les pieds ! — Quoi, Mais tu es folle, maman !... Et Yasmina a un léger sourire. — Viens donc t'allonger ici près de moi, tu es fatiguée. — Je te le jure, sur la tombe de ton père, je l'ai vu de mes propres yeux, j'étais assise près de la porte, et le mort était en face de moi, dans l'autre pièce. J'ai vu ses pieds remuer légèrement à deux reprises ! Les hommes ne se sont rendu compte de rien... — C'est impossible, voyons ! Tu as dû rêver ! Ce pauvre aâmi Brahim ! — Il n'est peut-être pas mort ! dit doucement Douja ou bien, il est devenu bezghough !. Ils auraient dû l'enterrer ce matin. — Voyons, yemma ! naâli chitane ! Le jour va bientôt se lever, il ne reste que deux ou trois heures et ta peur va s'envoler... Viens t'allonger ici ! Je te réveillerai à la prière du fedjr. (A suivre...)