Rendez-vous - La bande des bouchers se retrouve au café à 20h. Personne ne veut manquer l'événement de minuit. Vers deux heures environ, El-Hadj Makhlouf entre lentement dans le café, puis fait un signe à Azzouz. —Viens dehors, j'ai à te parler ! Quand les deux hommes sont dehors, dans un coin sombre le vieil homme dit d'un ton pressant : —Mon fils, puisque tu as décidé d'y aller, tiens, prends ça ! Et il lui colle dans la main... un revolver. — Quoi !.. ami Makhlouf ! Mais je ne peux pas !... C'est trop, voyons, il ne va rien m'arriver ! Mais l'autre, insiste. — Prends-le, et si tu vois quelque chose, tire en l'air ! la chose disparaîtra avec «el baroud». Azzouz gêné, mais néanmoins intrigué par la tournure que prennent les choses, cache l'arme dans la poche de son seroual et retourne avec le vieil homme dans le café où le thé à la menthe et le café «djezoua» coulent à flots, en attendant l'heure fatidique. — Nous partirons un peu avant toi Makhlouf. Nous ferons tout le tour en descendant triq jedida, tandis que toi, tu emprunteras les escaliers de «sansour» et tu traverseras le pont... On se retrouva au bout ! On t'attendra là-bas... — Si tu as besoin d'aide, n'hésite pas à crier, nous serons là ! Tandis que le groupe prend sur la gauche et amorce la descente de triq djedida avant de traverser le pont Sidi Rached et se diriger vers le lieu du rendez-vous, Azzouz, après avoir attendu un petit moment, entreprend de dévaler les escaliers de l'ascenseur, qui donnent directement sur le pont hanté par «rohania». Il est minuit et pas âme qui vive dans les escaliers sombres. L'ascenseur est immobilisé en haut de l'escalier, car il a cessé de fonctionner dès dix-huit heures. Azzouz descend d'abord d'un pas pressé puis, à mesure qu'il s'enfonce dans le noir, il ralentit son allure, la main frôlant le mur pour ne pas tomber ou buter. Petit à petit une sombre inquiétude le gagne. Il sent comme une menace sur ses épaules, qui alourdit de plus en plus l'atmosphère. Il enfonce la main dans sa poche, et saisit le revolver soudain réconforté par le contact du métal sur sa paume. Il ôte le cran de sécurité et le «clic» qu'il entend lui redonne un semblant de courage... ses pas résonnent sur les marches de fer, réguliers. (A suivre...)