Ravages - Retour sur l'une des tempêtes les plus puissantes du siècle. Peu connue du grand public, cette tempête est pourtant dans les mémoires de tous les habitants des côtes bretonnes, des côtes de la Manche et de l'Angleterre. D'une puissance peu commune, la dépression équivalant à un ouragan force 3 sur l'échelle de Saffir-Simpson, a laissé derrière elle des terres dévastées et des souvenirs impérissables chez ceux qui en ont réchappé. A partir de documents d'époque, de témoignages et des conditions synoptiques de la journée, retraçons cet événement remarquable et injustement oublié par les médias. Le début du mois d'octobre 1987 est dominé par un temps agité et doux. De nombreux témoignages convergent pour dire que l'ambiance en cet après-midi du 15 octobre était surréaliste. «Une sensation de chaleur», «transpiration excessive», «lourdeur» sont des descriptions qui reviennent souvent dans les témoignages. Le ciel aussi semblait avoir une couleur particulière, «jaunâtre» ou «jaune rose» pour d'autres donnant un aspect apocalyptique à cet après-midi. On peut se demander si ces deux phénomènes décrits ne sont pas de l'ordre du montage mental post-traumatique. Cependant, ce sont plus que de simples ressentis et ils peuvent tout à fait s'expliquer par la configuration météorologique de la journée. L'absence de chants d'oiseaux est souvent mentionnée dans les témoignages. Même si l'on sait que certains animaux sont sensibles à certains signes imperceptibles pour l'homme, il est impossible de certifier ce ressenti. Ainsi, les tout premiers jours, un anticyclone continental empêche les dépressions de pénétrer sur le territoire français (1-4 octobre). Soumis à des températures douces pour la saison, le continent est loin d'imaginer ce qui se prépare. Un changement s'opère entre le 4 et le 5 octobre cependant. L'anticyclone continental faiblit et laisse approcher une dépression qui remonte le long des côtes espagnoles ayant pour effet la création d'orages assez intenses remontant d'Espagne par le flux du Sud. On notera que ces orages formeront un système de méso-échelle (MCS) qui sera à l'origine de la fermeture de l'aéroport de Barcelone notamment. Les jours suivants seront aussi marqués par les intempéries sur l'arc méditerranéen causé par les gouttes froides présentes sur la péninsule ibérique. On dénombrera 4 morts, 15 blessés graves et de nombreux dégâts sur la Corse et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) les 9-10 octobre. On relève plus de 200 mm sur l'Ardèche et environ 100 mm dans plusieurs endroits en Méditerranée. En Bretagne, on dénombre 14 décès directs et indirects causés par la tempête. Après cet épisode méditerranéen, le calme ne revient pas pour autant sur la France puisqu'une dépression située au nord de l'Irlande générera des vents de 70 à 80 km/h sur les côtes de la Manche et les côtes atlantiques. Et c'est la Grande-Bretagne qui est désormais sur la route de l'infernale tempête... Lire demain : «Grande-Bretagne : tempête ‘'bombe'' sur les îles...»