Evocation - Dans le cadre de l'exposition photo intitulée : «Photographes de guerre, les djounoud du noir et blanc», le Musée national de l'art moderne et contemporain a organisé, hier, un colloque autour de «La Révolution et l'image». Lamine Bechichi, homme de radio pendant la Guerre de libération, est revenu, dans sa communication, sur l'histoire de la Radio algérienne déclenchée par un événement anodin. Il raconte : «Le déclic est venu lorsque Larbi Ben M'hidi, avec une petite radio, a intercepté une communication entre hauts responsables de l'armée française. Il appelle Abdelhafidh Boussouf et il le met au courant sur l'importance d'utiliser ce moyen pour la transmission des messages. Immédiatement, Boussouf devient responsable des transmissions. Cela aboutira au lancement de la radio.» Comptant bien fuir les persécutions du colonialisme, les initiateurs optent pour une radio clandestine ambulante. L'orateur ajoutera : «La première Radio fut créée dans le Rif marocain, c'était un studio ambulant qui émettait depuis un véhicule de transport. L'équipe rédactionnelle, de jeunes intellectuels algériens qui n'avaient jamais exercé dans le domaine journalistique, était restreinte. Cette Radio clandestine a cessé d'émettre en 1957 parce que, par solidarité, les capitales arabes nous ont ouvert leurs ondes, en réservant des heures de diffusion pour ‘La voix de l'Algérie combattante', à Tunis, à Rabat, au Caire, à Damas et à Bagdad.» Lamine Bechichi a remis aux musées nationaux des volumes d'archives des premiers numéros des journaux d'El Moudjahid, de La résistance algérienne et d'El Moukawama. «L'Algérie a vécu différentes périodes difficiles. J'ai jugé que le moment était mal choisi pour remettre de tels documents. Maintenant, les moyens sont disponibles pour en prendre soin et même les reproduire», a-t-il souligné. Pour sa part, Ali Haroun, a, dans sa communication, insisté sur la presse écrite pendant la Guerre de libération. Tout comme la radio, l'expérience a commencé avec des moyens rudimentaires, modestes et une équipe rédactionnelle inexpérimentée. «Les responsables du FLN voulaient créer un organe d'expression écrite pour le parti. J'ai rencontré Mohamed Boudiaf en 1956 à Rabat où il donnait l'ordre à Mohamed Moussaoui, Hocine Bensaleh et à moi-même de lancer un journal. Pour le lancement de ce nouvel organe, les conditions semblaient plutôt pénibles. Dans un garage dans la ville de Tétouan au Maroc, les membres de la rédaction utilisaient une vieille machine d'imprimerie datant de 1850, et du vieux papier pour éditer les premiers numéros du journal bilingue, La résistance algérienne. - «Le journal était entièrement fait à la main. Comme l'imprimerie appartenait à des Espagnols, la typographie utilisée était en espagnol. Ils ignoraient tout du français, alors nous étions obligés de contrôler les textes et de corriger les mots et la page était tirée à plat. C'était là une technique vieille de plusieurs années et complètement dépassée. Pour faire traverser à ce journal de deux pages, les frontières et le diffuser en Algérie, on a pensé à compresser le texte en un quart de page et le faire transporter avec du papier à cigarette», a précisé Ali Haroun. Il ajoutera : «Les articles publiés n'étaient pas exclusivement les nôtres. Des Algériens ordinaires qui savaient écrire, nous envoyaient spontanément leurs témoignages sur des faits, que nous reprenions dans nos pages.» Plus tard, Abane Ramdane décide d'unifier les journaux du FLN, sous un seul titre El Moudjahid, dont les 7 premiers numéros étaient édités sous forme de brochures et de tracts. Avec une équipe plus étoffée, qui regroupait Réda Malek, Frantz Fanon, Saâd Dahleb, Pierre Chaulet et bien d'autres encore, le FLN édite le numéro 8 du journal El Moudjahid sous une forme plus professionnelle. Il comptait 8 pages, une ligne éditoriale, et les articles étaient signés. Ainsi, naîtront les premiers médias algériens.