Situation - L'Egypte a été le théâtre, ce dimanche matin, de manifestations massives opposant pro et anti-Morsi, notamment au Caire. Dans un climat de vives tensions alourdi par la flambée de violences qui a fait 37 morts en 24 heures, le mouvement Tamarrod (rébellion en arabe) a appelé à une nouvelle mobilisation, aujourd'hui, dimanche. Sur la place Tahrir, des groupes de manifestants anti-Morsi qui y campent ont été rejoints par d'autres en prévision de cette marche. Dans le camp opposé, les Frères musulmans, cibles d'une campagne de répression des nouvelles autorités, ont de leur côté appelé à protester «par millions» contre «l'Etat policier» instauré après le «coup d'Etat militaire». Les islamistes ont promis de rester dans les rues jusqu'au retour de Morsi, premier président élu démocratiquement du pays, alors que l'influent prédicateur Youssef al-Qaradaoui, mentor des Frères musulmans dont est issu Morsi, a déclaré «nulle et non avenue» sa destitution dans une fatwa. Mohamed Morsi doit «rester président et aucun ne peut prétendre, au nom du peuple, avoir le droit de le destituer», ajoute cheikh Qaradaoui. Dans leur épreuve de force avec l'armée, les islamistes insistent sur le caractère «pacifique» de leurs appels à mobiliser, et dénoncent des provocations. Mais des résidents de certains quartiers du Caire ont affirmé avoir vu leurs partisans armés de sabres, de bâtons et d'armes automatiques lors de la nuit dernière marquée par de graves violences. Dans le quartier de Manial, des habitants ont fait état de combats à l'arme automatique et à l'arme blanche, et de tireurs embusqués postés sur des toits. Selon les résidents de ce quartier d'ordinaire paisible situé sur une île au milieu du Nil, les islamistes tentaient de se rendre place Tahrir, où étaient rassemblés des milliers de personnes hostiles au président déchu. «Des centaines de Frères musulmans ont déferlé depuis l'Université du Caire où ils se réunissent par milliers depuis plusieurs jours avec des armes à feu et des armes blanches», raconte un habitant. Ahmed Fattouh, lui, se souvient précisément de l'heure de l'attaque : «elle est survenue quelques minutes après la fin du discours du Guide suprême des Frères musulmans Mohammed Badie», qui a galvanisé ses partisans et appelé à rester par millions dans les rues jusqu'au rétablissement de Morsi. «Ils nous traitaient de mécréants, ils hurlaient «Allah Akbar» et nous tiraient dessus», poursuit Fattouh. «Mais ce ne sont pas des musulmans. Ce sont des terroristes qui veulent brûler le pays», lance-t-il. Mohamed Fakri reconnaît toutefois que la réaction des résidents à l'arrivée des islamistes a aussi été musclée, et qu'il y avait des armes des deux côtés. «Nous avons échangé des tirs avec eux, nous voulions nous défendre, défendre notre quartier et protéger Tahrir» assure-t-il. Mohamed Fakri parle de «10 morts, dont six de nos camarades tués d'une balle dans la tête». «Il y avait des tireurs embusqués postés sur le toit de la mosquée Salaheddine», poursuit-il. Hind Taha, une fonctionnaire qui a observé les heurts depuis sa maison rapporte la même chose. Dans divers endroits de la capitale, des barricades et des rues jonchées de pierres et de pneus calcinés témoignaient des violences, tandis que les forces anti-émeutes étaient présentes à plusieurs carrefours et ponts, avec des hommes en armes. Les accès à Tahrir étaient quant à eux contrôlés par des anti-Morsi armés de bâtons. Vendredi, dernier, les violences entre pro et anti-Morsi, mais aussi entre pro-Morsi et soldats, ont fait 30 morts et plus de 1 400 blessés, essentiellement au Caire et à Alexandrie au nord du pays.