Le gaspillage de cet aliment est constaté tout au long de l'année, mais il prend une dimension scandaleuse en ce mois sacré. La plupart des Algériens en achètent en quantités déraisonnables avant le f'tour, pour en jeter une grande partie, après. Outre le côté moral de la chose, le préjudice causé à l'économie nationale est certain. Pendant le mois de ramadan, le pain fait partie des produits alimentaires les plus demandés et les boulangers excellent dans sa confection. Du simple à l'amélioré, en passant par la traditionnelle galette, toutes les variétés sont disponibles. Avec cette panoplie, les boulangers cherchent aussi à faire fructifier leurs bénéfices, car le prix de la baguette, entre 10 et 50 DA, n'est pas réglementé en dehors de celle dite ordinaire. Face aux étagères bien garnies du boulanger, le citoyen se laisse tenter au point de ne plus contrôler ses envies. Ainsi, de grandes quantités de pain sont achetées quotidiennement avant le f'tour qui malheureusement ne seront pas toutes consommées. Et comme le pain de la veille est rarement mangé le lendemain, pendant le mois sacré, d'énormes quantités sont jetées et sont soit récupérées pour l'alimentation des bêtes ou des volailles, sinon, ce qui est plus grave, vont dans les poubelles. Néanmoins, cela demeure toujours du gaspillage et des dépenses inutiles qui peuvent, avec un peu plus de maîtrise et de volonté, être évités. Les poubelles des quartiers des grandes villes où ce phénomène est plus répandu, débordent de sacs pleins de pains rassis, ou même souvent frais, en ce mois de ramadan. Dans une boulangerie à Zoudj Ayoune à La Basse Casbah, une chaîne impressionnante de citoyens se forme chaque jour pour l'achat de khoubz Zeitoun (pain aux olives) à 25 DA la baguette. Ce boulanger qui dit vendre jusqu'à 1 000 pains par jour, ne se donne plus la peine de fabriquer et constate que «l'Algérien gros mangeur de pain, devient durant le ramadan beaucoup plus exigeant en matière de qualité. Mais cette qualité va malheureusement trop souvent dans les poubelles», regrette-t-il. Dans une boulangerie de la rue Hassiba-Ben-Bouali, la baguette de pain d'orge est cédée à 30 DA. A Bab El-Oued, un quartier populaire de la capitale, une baguette ordinaire est à 10 DA, matloue à 25 DA et kesra entre 30 et 50 DA, selon les composants. «En dépit de la cherté de ces différents pains, les gens trouvent toujours le moyen d'en jeter», témoigne un boulanger à Bab El-Oued. Ce qui étonne le plus notre interlocuteur, c'est lorsqu'il est face à un client qui repart avec presque une quinzaine de pains dans la ... malle de sa voiture. Ce gaspillage à grande échelle nuit non seulement aux bourses des ménages, mais aussi à l'économie nationale, sachant que la farine destinée à la confection du pain est subventionnée. Mais malgré tout ça, le gaspillage du pain n'a jusqu'à présent jamais fait l'objet d'aucune étude en Algérie et aucune campagne de sensibilisation n'a été menée à cet effet. A signaler que l'Union des commerçants et artisans algériens (UGCAA) a évalué le gaspillage alimentaire durant le ramadan à 500 milliards de centimes cette année et ce, en raison du degré de consommation qui a augmenté de 50% pour tous les produits alimentaires. Il a été aussi souligné que les produits subventionnés par l'Etat, à l'instar du lait et du pain, représentent 60% de la matière gaspillée, car la demande du consommateur est irrationnelle, en particulier durant les premiers jours du mois de jeûne.