Image Un spectacle s?impose au quotidien à tous les passants, un phénomène des plus ahurissants. Des femmes de différents âges sont, en permanence, assises, adossées aux murs, fidèles au rendez-vous. Ni le froid ni la chaleur ne les dissuadent de rejoindre leur emplacement pour tendre la main aux passants. Plutôt non, elles ne tendent même plus la main, car le spectacle qu?elles offrent suffit à convaincre? pensent-elles. Sur le visage de ces femmes, on distingue des signes de peur. Elles sont terrorisées, mais par quoi ? Un enfant, deux enfants, de plus en plus jeunes, de plus en plus de nourrissons qu?elles tiennent dans leurs bras ou sur leurs genoux, sont exposés au regard des uns et des autres. Qu?il vente ou qu?il pleuve, ces enfants sont traînés, d?on ne sait où, pour attendrir les âmes sensibles qui résistent rarement à l?image de l?innocence en souffrance. Et si l?on s?approche d?elles pour essayer de connaître leur histoire et le secret les ayant jetées sur les trottoirs pour mendier, elles détournent le regard, poursuivent leur éternel refrain : «Lawdjah Rabi ya khaouti, donnez-moi pour acheter un pain, pour payer du lait pour mes petits.» Lançant à leur interlocuteur un regard dissuasif pour lui signifier dans un silence qui en dit long «Je ne dirai rien», elles poursuivent leur refrain. Devant de telles images insoutenables, les passants ralentissent souvent le pas, une fraction de seconde, pour se décider à jeter la pièce de monnaie sur les genoux de la femme, accompagnée d?un enfant en bas âge, sale et mal habillé ou encore pire, malade ou handicapé. Parfois, ils hésitent à donner. Les âmes sensibles sont partagées entre le sentiment de charité et la crainte d?encourager la mendicité. Elles sont envahies par les sentiments de pitié et de dégoût. Qui n?a pas vécu ce dilemme en face d?un tel phénomène qui prend de l?ampleur dans l?indifférence de tous ?