Sortie - Nabil, vingt-deux ans, issu d'une famille plutôt aisée, entre avec un copain du même âge mais de condition modeste, au grand bazar de Bab-Ezzouar. Après s'être promenés à travers les allées de nombreux rayons, les deux amis s'arrêtent devant celui des gâteaux, des friandises et des tablettes de chocolat. — Nabil se met à saliver et explique à son ami les raisons de sa grande excitation stomacale. — Dis-moi, Hocine, tu as déjà goûté à cette variété de chocolat ? — Non, Nabil, hélas ! — Ah ! mais tu ne sais pas ce que tu rates, mon vieux... — Oui, je sais. Il n'y a pas que le chocolat que j'ai raté...j'ai même raté ma vie... — Alors continue à rater ta vie...Moi, je prends trois tablettes de ce chocolat aux noisettes... — L'ami plissa les sourcils : — Tu as vu les prix ? Chacune de ces tablettes vaut plus de 300 DA... — Oui, je sais. — Tu as donc de l'argent sur toi et tout à l'heure tu m'as obligé à te payer un café et un millefeuille en me faisant croire que tu étais fauché. — Nabil répond à voix basse : — Cesse de parler à haute voix. Oui, c'est vrai, je n'ai pas d'argent sur moi mais ce n'est pas une raison pour se priver de chocolat. — Mais tu es fou ? Tu as l'intention de piquer ces tablettes de chocolat ? — Oui, répondit Nabil. Et j'ai aussi l'intention de prendre un déodorant, j'en ai repéré un, hier... mais hier je n'avais pas mis mon blouson, donc il m'était impossible de le piquer. Sans poches, on ne peut rien piquer sans se faire voir ! — Le copain se met à trembler : — Tu ne parles pas sérieusement ? Tu es en train de blaguer, n'est-ce pas ? — Non ; je ne blague jamais quand je parle de chocolat et de déodorant. Le chocolat c'est bon pour l'estomac et le déodorant est bon pour attirer les filles ! — Mais tu as perdu la tête, ajoute le copain, toujours en parlant à voix basse et en souriant pour ne pas attirer l'attention des gens. Le bazar est truffé de caméras de surveillance tu vas nous attirer de gros ennuis.