Histoire ■ Quand Nora n'est pas rentrée chez elle le jeudi 23 janvier 2014 après sa journée de lycée, ses proches étaient loin de penser que l'adolescente était déjà en route pour la Syrie. Comme tous les parents, Mohammed et sa femme étaient inquiets de ne pas voir leur fille de 15 ans regagner le domicile familial. Ils n'ont pas tardé d'ailleurs à alerter la police qui a ouvert une enquête. Fugue, problème de santé, enlèvement, tous les scénarios ont été ima-ginés pour cette disparition sauf peut-être celui d'un départ en Syrie. «On n'avait aucunement songé à cela», ont reconnu par la suite les membres de cette famille marocaine qui réside à Avignon dans le sud-est de la France. Il faut dire que Nora n'avait rien d'une fille agressive ou brutale. «Ce n'est pas une personne violente, je ne sais même pas si elle s'est battue une fois dans sa vie», a indiqué son frère Fouad. De son avis, sa sœur a été endoctrinée par ses «contacts facebook qui ne lui parlaient que de ça, du djihad». «Je ne comprends pas. Je lui ai demandé de ne pas porter le hidjab, mais elle a insisté pour continuer à le faire. Dans notre famille, nous faisons la prière, mais nous n'imposons rien à nos enfants. J'avais confiance en elle», a affirmé, de son côté, le père. Selon les premiers éléments de l'enquête, Nora a connu, via Internet, une certaine Manon dont le mari est parti combattre en Syrie quelques semaines auparavant. Après plusieurs échanges, la mère de famille consent à aider la jeune adolescente à partir en Syrie «pour se marier». C'est ainsi qu'elle l'a accueillie, hébergée et emmenée à l'aéroport d'Orly où elle a embarqué à bord d'un vol pour le sud de la Turquie, près de la frontière syrienne, via Istanbul. Nora aurait préparé son voyage pendant des mois. A en croire son frère, certains de ses ami(e)s sur le réseau social facebook étaient au courant de son projet. Après son arrivée en Syrie, l'adolescente a contacté sa famille. «Elle nous a dit qu'elle est bien, qu'elle mange bien, qu'elle a de bons amis, qu'on ne doit pas s'inquiéter, mais elle ne veut pas ren-trer», a révélé son père qui a encore du mal à comprendre comment la «petite Nora» qu'il a tant gâtée et choyée et qui «ne manquait de rien» s'est radicalisée au point de décider d'aller faire la «guerre sainte» dans un pays dont elle ne connaissait pas grand-chose.