La publication d'un livre appelant à moderniser la langue arabe a suscité, cette semaine, la colère des islamistes égyptiens, qui ont demandé aux autorités de saisir l'ouvrage sous prétexte qu'il porte atteinte à la langue du Coran. Le livre, Vive la langue arabe, à bas Sibawayh (*), est écrit par Chérif Choubachi, journaliste et sous-secrétaire d'Etat à la Culture. Le député islamiste Hamdi Hassan a adressé au ministre de la Culture, Farouk Hosni, une demande pour saisir le livre, affirmant que l'auteur «attaque la langue arabe». L'auteur «a oublié que la langue arabe est différente des autres langues du monde entier, car c'est la langue du Coran», a souligné le député islamiste. Il a rejeté l'argumentation de l'auteur selon laquelle «la langue arabe est la cause du sous-développement de l'esprit arabe». M. Choubachi, de son côté, a assuré que «nous devons, en tant qu'Arabes, faire la distinction entre notre langue et le Coran». «Le Coran a employé la langue arabe pour faire parvenir son message à l'humanité (...) et 81% des musulmans ne connaissent pas l'arabe», a-t-il dit. «Nous devons faire une séparation entre le Coran et la langue arabe, et je réclame dans mon livre de développer la langue arabe.» M. Choubachi a souligné que l'arabe «est la seule langue dont les règles de grammaire n'ont pas été modifiées d'un pouce depuis 1 500 ans». «Et il faut actuellement procéder à des modifications de la grammaire pour développer la langue», a-t-il dit. M. Choubachi assure avoir été poussé à écrire ce livre par «l'aversion affichée par les étudiants et la nouvelle génération envers les cours d'arabe en raison de la grammaire compliquée», et par la nécessité de rapprocher «les intellectuels et les écrivains de la majorité de la population, les complications de la langue ayant créé un fossé entre eux». «Je trouve que les Arabes vivent dans un état de schizophrénie du langage, car ils utilisent dans leur vie courante une langue et écrivent et étudient dans une autre. Il est nécessaire de mettre fin à cette schizophrénie, et cela n'est possible qu'en développant le langage», a ajouté M. Choubachi. (*) Sibawayh est un grammairien qui a jeté, au VIIIe siècle, les bases de la grammaire arabe.